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Notre besoin d’être rassuré ou l’empathie divine Jean 16 : 32,33 |
Introduction :
Pourquoi nous sentons-nous toujours insécurisé et avons constamment besoin de preuves d’amour de Dieu ? Pourquoi avons-nous, chevillé au corps, ce besoin d’être rassurés ? Depuis la nuit des temps, l’humain a exprimé son besoin d’être tranquillisé, c’est-à-dire d’être dans un contexte de sécurité. Cela suppose, aujourd’hui encore, d’être délivré de toute inquiétude et de toute forme de danger. En Eden, Adam et Eve ont expérimenté l’absence de la protection divine après avoir rompu le contrat confiance qui les liait à Dieu. Ils ont fui et ont voulu se cacher, mais pour autant leur inquiétude n’a pas été solutionnée. Il a fallu que Dieu, comme un bon père, vienne au-devant d’eux pour les apaiser (cf. Genèse 3 : 8-13). Seulement, la défiance entrainant la désobéissance envers Dieu a eu des conséquences. C’est ainsi que la peur, l’angoisse, l’inquiétude, tout ce qui relève de difficultés existentielles a perduré jusqu’à nos jours…
Les temps modernes ont-ils contribué à améliorer la condition humaine sur ce point ?
Nous assistons impuissants à un effondrement des systèmes sociaux, économiques et spirituels. La collapsologie est la science qui permet de décrypter cette dégradation. Elle acte, dans les faits, la fin d’un monde, dans l’attente programmée de la fin du monde. Le drame de nos sociétés pétries de rationalité est d’avoir occulté les avertissements divins. Marginalisant et mélangeant, spiritualité et rites de religion, l’humain pense apporter une solution profane à l’énorme défi qui se présente à lui. Mais la réalité met en évidence une dégradation de sa qualité de vie.
Le constat, ne serait-ce qu’en France, est édifiant : les Français sont champions du monde dans la consommation de tranquillisants. Les psychologues observent aussi la montée croissante du besoin d’être rassuré… Peut-on remédier à cette situation ? Interrogeons les Saintes Ecritures pour mener notre enquête. Identifier la difficulté, c’est bien, y apporter des solutions, c’est mieux !
Développement :
Dans le Nouveau Testament, en particulier deux verbes grecs traitent le sujet.
« Aussitôt, Jésus obligea ses disciples à remonter dans la barque et à le précéder sur l'autre rive, vers Bethsaïda, pendant que lui-même renvoyait la foule. Après l'avoir congédiée, il partit dans la montagne pour prier. Le soir venu, la barque était au milieu de la mer, et lui, seul, à terre. Voyant qu'ils se battaient à ramer contre le vent qui leur était contraire, vers la fin de la nuit, il vient vers eux en marchant sur la mer, et il allait les dépasser. En le voyant marcher sur la mer, ils crurent que c'était un fantôme et ils poussèrent des cris. Car ils le virent tous et ils furent affolés. Mais lui aussitôt leur parla ; il leur dit : « Confiance, c'est moi, n'ayez pas peur. »
Il monta auprès d'eux dans la barque, et le vent tomba. Ils étaient extrêmement bouleversés. » Marc 6 : 45-51, version TOB.
La situation des disciples est intéressante à analyser.
Ils venaient de connaître une journée mémorable. Le Seigneur Jésus avait miraculeusement multiplié cinq pains et deux poissons pour nourrir une foule estimée à près de cinq mille personnes (sans compter les femmes et les enfants). De son côté, l’apôtre Jean nous informe qu’à cette occasion, et devant le prodige du Maître, la foule a cherché à ravir le Christ afin de le couronner roi (cf. Jean 6 : 14).
Imaginons dans quelle ambiance euphorique devaient se sentir les apôtres ! Non seulement ils devaient partager cette liesse populaire, mais encore fiers d’avoir fait le bon choix, ils pouvaient envisager d’occuper des postes de responsabilité sous « sa présidence royale ». Toute cette effervescence était cependant contraire à la mission du Seigneur, car son heure n’était pas encore venue. Alors, il a fallu briser net ce rêve populaire. Le Christ a obligé ses disciples à passer de l’autre côté du lac (le verbe est fort : ἀναγκάζω = anagkazo = forcer, conduire à, contraindre par force, menaces).
Ainsi, le rêve s’est transformé en cauchemar. En pleine nuit, une tempête s’est levée et les apôtres, pourtant aguerris aux caprices du lac, ont paniqué. Dans cette détresse bien compréhensible, ils ont cru voir un fantôme. Or, c’était le Christ qui venait à leur secours. Le Christ a répondu à leur besoin d’être rassuré.
1) C’est dans ces circonstances que le premier verbe grec, exprimant cette réalité, est présenté : θαρσέω = tharseo = rassurer, avoir du courage, avoir confiance.
Pourquoi le Seigneur a-t-il agi de la sorte, sinon pour nous faire comprendre qu’aucune vraie relation ne peut faire l’économie de la confiance. Or, cette dernière ne s’impose pas naturellement. Tout part de notre aspiration à être rassurée (surtout depuis l’avènement du mal qui a mis à mal notre relation à Dieu) pour que naisse la confiance en Dieu. Encore faut-il prendre conscience de toutes nos fragilités !
Tout comme les disciples combien de fois avons-nous paniqué devant des situations imprévisibles ! Combien de fois avons-nous ressenti un état d’abandon. Quand soudain tout semble se dérober sous nos pieds et que nous sommes seuls, le désappointement et l’angoisse nous étreignent. Qui n’a pas connu une journée au cours de laquelle tout s’emmanche mal dès le matin ! C’est bien dans ces moments-là qu’il faut se souvenir de l’intervention divine. Le Christ, tout comme son Père, ont des sentiments positifs constants vis-à-vis de l’humain en situation de crise « Jésus-Christ est le même, hier, aujourd’hui, et éternellement » Hébreux 13 : 8, version LSG. « Tout ce qui nous est donné de bon et tout don parfait descendent d'en haut, du Père des lumières, en qui il n'y a pas de variation ou d'ombre de changement » Jacques 1 : 17, version DRB.
Nous venons de survoler un récit abordant le besoin d’un groupe de personnes. Examinons maintenant un aspect plus personnel dans lequel le verbe θαρσέω est employé.
« Ils arrivent à Jéricho. Comme Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une assez grande foule, l'aveugle Bartimée, fils de Timée, était assis au bord du chemin en train de mendier. Apprenant que c'était Jésus de Nazareth, il se mit à crier :
« Fils de David, Jésus, aie pitié de moi ! » Beaucoup le rabrouaient pour qu'il se taise, mais lui criait de plus belle : « Fils de David, aie pitié de moi ! » Jésus s'arrêta et dit : « Appelez-le. » On appelle l'aveugle, on lui dit : « Confiance, lève-toi, il t'appelle. » Rejetant son manteau, il se leva d'un bond et il vint vers Jésus. S'adressant à lui, Jésus dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » L'aveugle lui répondit : « Rabbouni, que je retrouve la vue ! » Jésus dit : « Va, ta foi t'a sauvé. » Aussitôt il retrouva la vue et il suivait Jésus sur le chemin. » Marc 10 :46-52, version TOB.
Le récit narratif présente un acteur marginalisé par la société à cause de son handicap. C’est un homme aveugle, mais aussi bien connu, car on cite son nom ainsi que celui de son père (ce qui est rare dans les Evangiles). Comme tous les aveugles et lépreux de l’époque, sa seule façon d’exister, (donc de pourvoir à son minimum vital) était de mendier. En tant que français nous sommes habitués à toutes les aides sociales, mais encore aujourd’hui dans de nombreuses parties du monde, ces pauvres hères sont sans ressources. Livrés à eux-mêmes, ils dépendent uniquement de la générosité de ceux qui les entourent. Bartimée était de ceux-là. C’est la raison pour laquelle, en entendant que Jésus de Nazareth arrivait, il se mit à crier sa détresse (la réputation de Jésus, fils de David, l’ayant précédée, Bartimée a saisi l’occasion pour proclamer sa souffrance). Même si beaucoup ont essayé de le faire taire, sa détermination, sans égale, sonnait comme une note discordante sur le passage de cette procession imposante.
Du coup, Jésus s’arrête et le fait appeler. Confirmons ici l’empathie du Seigneur face à la détresse humaine. Elle symbolise toute l’action bienveillante de Dieu. Quant à Bartimée, il peut aussi être le symbole de chacun et chacune d’entre nous, car on peut encore aujourd’hui exprimer sa souffrance comme bon nous semble avec nos propres mots…
On a donc appelé l’aveugle, et c’est là que le verbe θαρσέω (traduit ici par confiance) est usité. Assurément, Bartimée avait besoin d’être rassuré. La souffrance dans son quotidien avait entamé sa confiance dans une vie sans soleil. Sa condition l’avait sûrement amené à être méfiant, car la malveillance sur le bord des chemins était monnaie courante. Le Seigneur va faire abstraction de tous ceux qui le suivaient pour s’intéresser à lui tout particulièrement. Il va lui poser une question qui nous paraît superflue : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? ». Et pourtant ! Il fallait que cet homme explicite personnellement son besoin. L’empathie du Seigneur nous renvoie à cette exigence. Il nous appartient de formuler individuellement nos besoins (nos angoisses, nos peurs, nos souffrances…). Même s’il y a de la bienveillance autour de nous, rien ne peut remplacer une formulation personnelle envers Dieu. Il nous faut prendre à notre compte notre présent, et c’est ce que Bartimée a très bien fait. La suite est toute aussi instructive. Le Seigneur a répondu à son attente, mais en y mettant des priorités : « Jésus dit : « Va, ta foi t'a sauvé. » Aussitôt il retrouva la vue et il suivait Jésus sur le chemin ».
Observons que la priorité du Seigneur vis-à-vis de l’humain a toujours été son salut. C’est-à-dire permettre à tous et à chacun une relation qui transcende le temps. La promesse de la vie éternelle recouvre cette réalité dans un monde nouveau où il n’y aura plus ni larmes, ni cri, ni douleurs, ni deuil (cf. Apocalypse 21 : 4). Pour le Christ, cet objectif premier nous renvoie explicitement au sens de sa mission sur notre planète.
Pour nous permettre d’entrevoir ce bonheur futur, le Seigneur a inscrit dans le présent le bienfait de la guérison de toute maladie ou infirmité. Mais là encore, le choix de Jésus est très personnel, car lui seul détient toutes les bonnes informations. Elles sont toujours utilisées en lien avec son objectif premier qui procède de l’amour. Si on parvenait à intégrer cette donnée fondamentale, aucun sentiment d’injustice naîtrait dans nos esprits à l’encontre de Dieu le Père. L’indifférence se dissiperait tout naturellement.
2) L’apôtre Paul utilisera un autre verbe grec : εὐθυμέω = euthumeo= 1) rassurer, réjouir, rendre gai 1a) esprit bien disposé, rassuré 2) être joyeux, être réjoui, prendre courage). Il décrit le même besoin humain : celui d’être rassuré.
« C'est pourquoi, ô hommes, rassurez-vous, car j'ai cette confiance en Dieu qu'il en sera comme il m 'a été dit » Actes 27 : 25, version NEG. (Observons le lien entre le fait d’être rassuré et celui d’avoir confiance en Dieu).
Rappelons succinctement dans quelles conditions, l’apôtre a prononcé cette phrase.
L’apôtre, totalement engagé dans la proclamation de l’Evangile de Christ, est l’objet d’un complot des Juifs (cf. Actes 23). Pour échapper à la mort, il est exfiltré dans le prétoire d’Hérode. Le gouverneur romain Félix lui demande alors de s’expliquer. C’est à cette occasion, que quelques temps après, Paul en appelle à César (cf. Il en avait le droit en tant que citoyen romain. Actes 25 : 10-11). L’apôtre fut donc acheminé à Césarée, et c’est de ce port qu’il fut embarqué, sous bonne garde, pour Rome. Son grand désir de comparaître devant le grand César, allait pouvoir se réaliser ! Mais lors de cette traversée le bateau fit naufrage. Seulement, Dieu avait prévenu son serviteur ! C’est la raison pour laquelle l’apôtre prononça la phrase ci-dessus.
« Rassurez-vous, ô hommes ». En situation de péril, donc d’extrême danger pour la vie de tous les membres de ce bateau, l’apôtre a eu un rôle décisif pour apaiser les angoisses de chacun. La qualité de sa relation à Dieu lui a conféré cette responsabilité. Il l’a exercée énergiquement, avec respect, tout en étant serein et déterminé.
Ce récit peut symboliser la situation de notre monde, qui tel un bateau ivre est sur le point de faire naufrage. Dieu a besoin d’hommes et de femmes de la trempe de Paul. Aucune situation si désespérée soit-elle est sans espoir. Notre passage sur terre est comme cette traversée en période difficile, pour ne pas dire périlleuse. Il nous faut acter le fait que ce n’est qu’un passage. C’est bien la destination qui est importante ! La confiance en Dieu qui rayonnait de l’apôtre a été contagieuse, et aucun participant de cette traversée n’a péri. « Tous parvinrent à terre sains et saufs » Actes 27 : 44, version LSG.
Ce récit est un puissant encouragement pour tous ceux et celles qui souffrent, doutent, angoissent et craignent pour leur avenir. Aussi extraordinaire et utopique que cela puisse paraître, l’espoir doit toujours demeurer présent, car Dieu par Jésus-Christ a toujours été fidèle à sa Parole. Ce qu’Il promet, Il le tient. Tout se réalisera selon le plan bienveillant qu’il a conçu pour notre humanité. Mais chacun est libre de ses choix. C’est pour nous inciter à faire les bons que l’apôtre a utilisé simultanément les deux verbes grecs traitant notre sujet (cf. Actes 23 : 11 ; 27 : 23).
Le fait d’être rassuré semble un passage obligé pour que notre foi en Dieu se fortifie. L’apôtre Jacques en témoigne : « Mes frères, regardez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves auxquelles vous pouvez être exposés » Jacques 1 : 2, version LSG). Cette traversée des épreuves est présentée dans les Evangiles comme une donnée incontournable de la vie chrétienne. Ainsi, tous les Evangiles contiennent des exhortations à persévérer spirituellement jusqu’à la fin (qu’elle soit la nôtre ou celle du monde).
La raison qui est mise en exergue par l’apôtre Jean est limpide : Christ a vaincu le monde. Déjà du temps des apôtres, la prise en compte de ce fait majeur s’imposait !
Christ dira à ses disciples : « L’heure vient – elle est venue – où vous serez dispersés chacun de son côté, et où vous me laisserez seuls ; mais je ne suis pas seul, car le Père est avec moi. Je vous ai parlé ainsi pour que vous ayez la paix en moi. Dans le monde, vous connaissez la détresse, mais courage ! (θαρσέω) Moi, j’ai vaincu le monde » Jean 16 : 32,33, version NBS.
Le même apôtre écrira aux chrétiens dispersés : « Tout ce qui est né de Dieu est vainqueur du monde ; et la victoire qui a vaincu le monde, c’est notre foi » 1 Jean 5 : 4, version NBS.
Pourquoi avons-nous besoin d’être rassurés, si ce n’est pour que notre foi triomphe !
Par extension, quand on manque de confiance en soi et en l’autre, il est difficile de vivre une relation sereine et féconde. Mais reconnaissons que de nos jours tout alimente notre anxiété, et personne n’est totalement imperméable à cette détresse.
Aujourd’hui, le Seigneur nous rassérène en nous disant « courage ! », autrement dit étymologiquement : « soyez rassurés ! ». La raison invoquée est la référence à sa propre victoire sur le mal. Ainsi, nous pouvons être placés au bénéfice de cette victoire essentielle. De ce fait, le vrai courage consiste à accueillir la proposition du Christ répondant à notre besoin d’être rassuré.
C’est par exemple le témoignage que nous a laissé Joseph d’Arimathée, un éminent membre du conseil (certainement du Sanhédrin). Il a eu l’audace d’affirmer sa foi, dans un contexte fort problématique, pour ne pas dire dangereux. IL alla réclamer à Pilate le corps de Jésus, cf. Marc 15 : 43, version TOB (τολμάω = tolmao =1) ne pas redouter, ne pas fuir par la crainte 2) supporter, endurer 3) se mettre à faire 4) être hardi 5) s'amener hardiment, traiter avec audace). Malgré un danger réel, Joseph d’Arimathée a assumé son engagement de foi.
De son côté, fort de la conviction que Dieu par Jésus-Christ répond à notre besoin d’être rassuré, l’apôtre Paul a pu écrire aux chrétiens de Corinthe : « C’est pourquoi nous ne perdons jamais courage. Même si notre être physique se détruit peu à peu, notre être spirituel se renouvelle de jour en jour » 2 Corinthiens 4 : 16, version TOB.
Conclusion :
Dans un monde de plus en plus en tension, nous sommes tous contaminés par des phénomènes déstabilisants. Un climat anxiogène, tel un virus malin, perturbe nos quotidiens. Dès lors, quoi de plus normal que de ressentir un besoin d’être rassuré. Certes, notre orgueil peut être mis à rude épreuve, mais laissons nos états d’âme au vestiaire. Le Christ a fait la démonstration de son amour envers nous, en nous plaçant au bénéfice de sa victoire. L’apôtre Jean décrit ce qui devrait être la conséquence concrète de cette réalité : « De crainte, il n'y en a pas dans l'amour ; mais le parfait amour jette dehors la crainte, car la crainte implique un châtiment ; et celui qui craint n'est pas accompli dans l'amour » 1 Jean. 4 :18, version TOB. Un peu plus loin dans son billet, il dira : « La victoire qui triomphe du monde, c’est notre foi » 1 Jean 5 : 4, version LSG. L’épître aux Hébreux démontre, que de tout temps, des vrais héros se sont levés pour proclamer la victoire sur le mal (sous toutes ses formes). « Voilà donc pourquoi nous aussi, enveloppés que nous sommes d'une si grande nuée de témoins, nous devons rejeter tout fardeau et le péché qui nous assiège, et courir avec constance l'épreuve qui nous est proposée » Hébreux 12 : 1, version FBJ.
« C’est une chose étrange à quel point la sécurité de la conscience donne la sécurité du reste ». Victor Hugo, écrivain et député de paris de 1848-1851.
Jacques Eychenne
PS : TOB, version Traduction Œcuménique de la Bible ; DRB, version Darby ; NBS, version Nouvelle Bible Segond ; FBJ, version Française de la Bible de Jérusalem.