Jésus et la Samaritaine 2ème partie

JEAN 4 : 1-42

(Version La Nouvelle Bible Segond 2002)

Pour étude personnelle ou en groupe

2ère partie

 

 

 

Nous poursuivons notre approfondissement du texte…

 

v. 8 « Ses disciples, en effet, étaient allés à la ville pour acheter des vivres. »

 

Cette précision est explicative de la présence solitaire du Christ.

Nous avons déjà abordé cette précision. Elle laisse entendre que le Christ avait besoin d’être seul pour aborder la Samaritaine. Il semble même que la discrétion et l’intimité de cette rencontre ait été souhaitées par le Seigneur. Si on se souvient qu’il existait un important contentieux historique et spirituel entre les Juifs et les Samaritains, cela n’a rien d’étonnant. En dehors de cette explication, on ne comprendrait d’ailleurs pas pourquoi il était nécessaire que tous les disciples partent en ville pour s’approvisionner. Ou alors, il faut envisager un approvisionnement important, mais cela n’était pas dans les habitudes de fonctionnement du Seigneur.

N’y a t il pas de situations analogues sur nos chemins ? Cet état de fait peut-il être une invitation à saisir les occasions fournies par la Providence pour vivre de belles rencontres spirituelles ?  

 

v.9a « Comment toi, qui es juif, peux-tu me demander à boire, à moi qui suis une Samaritaine ? »

 

La réaction de cette femme est significative:

Elle nous renvoie au contentieux qui opposait les Samaritains et les Juifs. Nous l’avons déjà mentionné en note la dernière fois, essayons maintenant de revoir les faits. Quel était le problème ?  Quand cela s’est-il passé ? Examinons les conséquences de ces faits historiques :

L’histoire nous apprend qu’effectivement, la neuvième année du roi Osée, roi d’Israël en Samarie, Sargon, roi d’Assyrie, prit cette région et déporta les Juifs (27290 d’après F. Vigouroux. Dict. tome 5 p. 1407) en Assyrie, en 721 av. J.C. Par stratégie politique, ses successeurs décidèrent une transplantation de population.  Provenant de cinq régions assyriennes différentes, ils s’installèrent en Samarie à la place des enfants d’Israël. (Cf.2 Rois 17 : 3, 6,24-41). Ces expatriés, Assyriens pour la plupart, ont cumulé un double handicap : Celui d’être déracinés et celui d’être peu préparés à la vie religieuse du pays d’Israël, malgré certaines connaissances. (Cf. 2 Rois 17 : 26). En conséquence, le roi d’Assyrie dépêcha un prêtre d’Israël, (qui avait été emmené en captivité), pour enseigner aux Samaritains la manière de servir le Dieu du pays. (Cf. 2 Rois 17 : 27). Le résultat fut une grande confusion pour ces Samaritains. Car ils ont continué à pratiquer leurs coutumes (càd, à vénérer leurs propres dieux, entre autres Nergal. Ils allèrent jusqu’à brûler leurs enfants en l’honneur d’Adrammélec et d’Anammélec). Mais de surcroît, ils ont essayé de servir, en même temps, le Dieu d’Israël. (Cf. 2 Rois 17 : 33). Ils ne reconnaissaient que les écrits de Moïse, à l’exclusion de tous les autres écrits de l’A.T. La confusion devenait inévitable !

Toutefois la forte inimitié semble s’être construite lors du premier retour de l’exil vers 538 av. J.C, quand Cyrus donna la permission de reconstruire Jérusalem et son temple. Zorobabel et Néhémie écartèrent les Samaritains de cette reconstruction. Ils ne reconnaissaient pas à ce peuple Samaritain corrompu (à leurs yeux), le droit de faire partie intégrante du peuple d’Israël et donc d’avoir la nationalité israélite... Donc de participer à cette restauration…

(Cf. Esdras 4 : 1-4, 10,17 ; Néhémie 2 : 17-20).

 

La réaction de la femme Samaritaine est donc significative sur ce point. Le dialogue paraissait impossible, mais le Christ l’a volontairement entrepris, tout en refusant de donner les raisons de sa motivation...

Pouvons-nous de nos jours rencontrer une situation comparable ?

Que faire des problèmes communautaires ? Faut-il tout accepter ? Comment nous positionner dans de telles circonstances ? (Voire encore l’accueil de l’étranger et les droits de l’étranger (Cf. Matthieu 25 : 35 ; Exode 22 :20, 23 :9,12 ; Lévitique 17 : 8-10 ; 19 :33-34 ; Deutéronome 10 :19 ; 14 :21,29 ; 24 :17 ; Jérémie 22 :3)

Pour les limites du droit des étrangers (Cf. Exode 12 :19,43 ; 20 :10 ; 34 :16 ; Lévitique 22 :10,24 :16 ; Esdras 10 :2 ; Matthieu 17 :25 )

Pour mieux saisir l’importance du mur de séparation qui existait entre ces deux peuples, le texte précise :

 

v.9b« Les juifs, en effet, ne veulent rien avoir de commun avec les Samaritains. »

Cette incise est là pour nous aider à mieux saisir l’importance du mur de séparation qui existait entre ces deux peuples.

 

Devant cette situation apparemment bloquée le Christ va de nouveau reprendre l’initiative du dialogue. Que vous inspire sa démarche sur un plan personnel ? Peut-elle nous servir d’exemple face aux divers conflits : socio-familio-géopolitico-communautario-religieux ? Nous touchons là une actualité brûlante !

Ajoutons que du temps de Jésus, c’était faire injure à un Juif que de l’appeler Samaritain. Jésus lui-même en a fait l’expérience (Cf. Jean 8 :48)

D’ailleurs le Seigneur avait donné comme directive, de suite après l’appel des douze apôtres, de ne pas aller vers les non-Juifs, ni d’entrer dans une ville Samaritaine(Cf. Matthieu 10 :5)

 

v.10 « Jésus lui répondit : Si tu connaissais le don de Dieu, et qui est celui qui te dit : « Donne-moi à boire », c’est toi qui le lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive. »

 

Le Christ ne répond pas à la question légitime de la femme. Pourquoi ? Finement, il retourne le lien de l’offre et de la demande. Il procède par inversion. A-t-elle été rassurée ?

Délaissant la querelle historique, sur quelle double argumentation, repose l’interpellation du Seigneur ? Pourquoi le Christ ne répond-t-il pas à toutes nos demandes comme nous l’espérons ? Ne sommes-nous pas dans ce même registre de méconnaissance du don de Dieu ? N’est-ce pas cela qui fausse notre relation à Dieu ?

- Premier argument : la question de la connaissance.

- Deuxième argument : Qui devait et devrait être demandeur ?

Tactiquement ce renversement de situation est très fort. Que nous inspire-t-il ? Comment peut-il nous concerner ? Avons-nous suffisamment pris en compte le don de Dieu ? La démarche d’éveil, stimule la curiosité, est-ce une bonne méthode ? De quelle eau parle Jésus ? Etait-ce évident à saisir ? (Voire Jean 7 : 38-39). Eau vive= litt. Vivante, (même utilisation dans Jean 6 :51). Le mot désigne une eau courante par opposition à l’eau de pluie recueillie jadis dans des citernes. Cette source souterraine suggère la symbolique de la vie. (Il y a l’eau qui tombe, et l’eau qui jaillit, les deux sont don !) Solliciter notre besoin de connaître, n’est-ce pas la meilleure pédagogie ? Qu’ est-ce que Jésus veut faire comprendre à cette femme ? Est-ce que cette eau vive ne se trouve qu’en Jésus ? (Cf. Jean 14 : 6 ; Colossiens 3 : 4)

 

v.11« Seigneur, lui dit la femme, tu n’as rien pour puiser, et le puits est profond ; d’où aurais-tu donc cette eau vive ? »

 

La question de cette femme est comment cela peut se faire ? Ou comment est-ce possible ? Car Jésus n’a rien pour puiser… Ne peut-on pas dire que cette femme défie Jésus, en lui faisant remarquer qu’il n’a rien pour puiser ?  

Par delà cette situation, n’avons-nous pas des questions similaires avec nos «  comment est-ce possible Seigneur ? ». 

Notre foi est-elle conditionnée par le visible, le toucher, le voir, le sentir ? Dire que Jésus n’a rien, et qu’il est en manque de moyens, n’est-ce pas l’audace des humains ?

Mais plus positivement, qu’est-ce qui dans le texte, nous permet de dire que la perception de cette femme évolue ? A-t-elle un changement de comportement ? La réponse est positive : Jésus n’est plus le Juif de tout à l’heure. Elle l’appelle respectueusement Seigneur. Mais alors, sur quoi repose sa perplexité ? La Samaritaine ne comprend toujours pas où le Seigneur veut en venir… Qu’est-ce qui nous indique que le passage du matériel au symbolisme spirituel s’amorce timidement ?

Le paradoxe est criant : Celui qui apparemment n’a rien est celui qui pourtant peut donner.

Sur un plan relationnel que nous inspire cette remarque ?

Mais revenons à la question de la Samaritaine. Quelle est cette eau vive ? Elle reprend la formulation du Christ, mais la comprend-t-elle ? Assurément, elle balbutie. Pense-t-elle qu’il s’agit de l’eau de ce puits ? Le Seigneur ne veut-il pas redonner à ce puits sa vocation première de source bouillonnante pour toute vie ?Ce n’est certes pas pour rien, que dans le texte original grec, on parle de source, puis d’un puits profond, puis de nouveau de la source (Cf. v.6, 11,14) Que pouvons-nous en déduire ?

 

v.12« Serais-tu, toi, plus grand que Jacob, notre père, qui nous a donné ce puits et qui en a bu lui-même, ainsi que ses fils et ses troupeaux ? »

 

Dans un réflexe d’orgueil national, elle demande à Jésus s’il se croit plus grand que le patriarche Jacob. En même temps, elle doit avoir un sentiment bizarre... Qui est en fait celui qui me parle, semble dire cette femme ? D’un autre coté, pourquoi repart-elle sur le terrain historique ? Veut-elle démontrer ce qu’elle sait ? N’est-elle pas à son tour provocatrice, quand elle présente Jacob comme père des Samaritains, à Jésus qui est Juif ? (Les Samaritains se reconnaissaient descendre de Jacob par Joseph et ses fils, Ephraïm et Manassé). Ou alors, manifeste-t-elle sa foi dans ce qu’elle connaît de l’histoire de Jacob, comme pour se rassurer ? Est-ce aussi dire qu’elle a fait le choix d’accepter le Dieu de Jacob son ancêtre spirituel? Si elle se présente comme fille spirituelle de Jacob, n’est-ce pas affirmer une ouverture dans sa foi ? Cette affirmation ne révèlerait-elle pas une attente profonde qu’elle ne peut encore définir ? Théologiquement que soutend son affirmation ? Une chose est cependant claire : le puits dont il est question est bien ce puits historique acquis par Jacob. (Sourire de l’histoire, la tradition juive appelle cette source : le puits du don).

 

v.13,14« Jésus lui répondit : quiconque boit de cette eau aura encore soif ; celui qui boira de l’eau que, moi, je lui donnerai, celui-là n’aura jamais soif : l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau qui jaillira pour la vie éternelle. »

 

La non-réponse du Seigneur n’est pas faite, là encore, pour la rassurer. Elle qui voulait s’accrocher à sa certitude historique, là voilà de nouveau fragilisée. A aucun moment le Christ semble vouloir clarifier son identité. (Dieu a agi de même à la création : Il n’a pas ouvertement décliné son identité. il a agi et c’est son action qui nous révèle qui il est. Il nous a laissé le soin de découvrir son identité). Ici cela semble procéder de la même démarche : Cette femme doit découvrir par elle-même qui est vraiment Jésus.

Cette démarche du Seigneur perdure et interpelle chacun de nous…

L’eau fait partie des besoins essentiels de la vie, mais de quelle eau parle le Seigneur ? Tout en étant clair, le christ ne définit toujours pas ce qu’est cette eau. Pourquoi ? N’y a-t-il pas un déplacement du vrai besoin ? Partant d’un puits localisé, d’un endroit historique identifié, Jésus ne veut-il pas introduire une permanence hors de l’espace et du temps ? Est-ce que la Samaritaine est appelée à ce déplacement ? Le Christ n’a-t-il pas le même désir de transformer nos vies stagnantes en source bondissante et jaillissante ? N’a-t-il pas voulu donner la priorité dans nos relations à une réalité plus intérieure et plus personnelle ? Quelle est belle cette grande intention de Dieu !   Ne nous révèle-t-elle pas son sublime projet de salut ? Après avoir été couvert d’eau, immergé lors de notre baptême, nous voici invités, à travers cette femme, à être remplis intérieurement par cette source de vie. Les 2 symboles du don – l’eau qui tombe et recouvre, et celle qui jaillit de l’intérieur – sont là représentés. Mais deux mots ont dû l’impressionner : vie éternelle. Le projet est pour maintenant et pour toujours (jusque dans la vie éternelle). Il n’y a qu’une condition : accueillir cette grâce. Et c’est précisément ce que va faire cette Samaritaine. Cette déclaration nous invite à une réflexion sur notre vrai besoin dans l’espace et le temps. Dans l’espace : y a t il un endroit quelque part qui réponde à notre vrai besoin ? En d’autres termes, détectons-nous les puits de vie sur nos parcours ? Dans le temps : est-ce que nous voulons être dans la satisfaction temporelle ou dans le vrai besoin d’éternité ? Ne sommes-nous pas amenés, comme la samaritaine, à nous centrer sur la proposition du Christ touchant le partout et le toujours de notre besoin ?

Que dire du passage du puits à la source ? (De ce que nous puisons, à ce que nous donnons) Passage du matériel au spirituel ? Le temps fort de notre vie n’est-il pas l’accession, en relation à Dieu et au prochain, à l’autonomie du don dans sa permanence ? Autrement dit, passer du encore soif, à plus jamais soif !

 

A suivre…

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