Le Jugement dernier

   

 

 

Matthieu 25:31-46

 

 

Introduction :

 

Le dernier grand message du Christ, rapporté par Matthieu dans son évangile, est centré sur le jugement dernier. Matthieu est le seul à présenter ce sujet (si dérangeant pour beaucoup). Est-ce à cause de son passé, de son ancienne situation de péager? Ancien publicain, percepteur d’impôts à la solde des Romains, que d’humiliations Matthieu n’a–t-il pas subies ! Que de mépris n’a-t-il pas enduré avant d’être libéré par la parole du Nazaréen !  Cela expliquerait que Matthieu ait été rendu sensible au discours de son Maître centré sur ce thème. Matthieu le place chronologiquement, juste avant les grands moments de la passion du Seigneur. Bien qu’écrit une vingtaine d’années après les évènements, Matthieu présente  son acte de foi : La victoire de son Maître est anticipée. De ce fait, il présente un Christ glorieux, majestueux, resplendissant :

 

« Lorsque le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, avec tous les anges, il s’assiéra sur son trône glorieux. Toutes les nations seront rassemblées devant lui ». V. 31

 

Cette présentation est déjà rassurante : c’est le fils de l’homme qui vient, Lui qui est mort pour nous. Sa solidarité avec la race humaine aura traversé le temps… L’amour aura triomphé du jugement.

La suite du récit ne va pas nous décevoir. Elle présente le jugement dernier d’une façon inédite. Elle me réjouit et me rend paisible à la fois ! Adieu la crainte, vive l’espérance.

C’est fort dommage, que pour des raisons de pouvoir, l’Eglise dite chrétienne au cours de son histoire, ait  dénaturé complètement le fond et l’enjeu du jugement dernier. Elle a fait de ce sujet un moyen de pression, par la peur du châtiment le plus redoutable : celui du feu. La culpabilisation et la crainte ont été les leviers d’une adhésion faussée à la foi chrétienne.

 

Développement :

 

La scène d’intronisation présentée par Matthieu, se poursuit par l’inauguration d’un royaume. Le roi sépare, tel un berger avec son troupeau, les brebis d’avec les boucs. Chacun sait que les brebis sont des moutons femelles et les boucs des chèvres mâles. Une précision intéressante est mentionnée dans ce texte. Ce  bouc  (εριφος) du verset 32 est appelé petit bouc (εριφιον) au verset 33. Cela laisse à penser qu’il  n’est  pas parvenu à l’âge adulte, qu’il  n’a pas atteint  sa maturité. Ce détail nous permet peut-être de comprendre pourquoi les boucs, pardon, les petits boucs, ne sont pas du bon coté, c'est-à-dire à droite. Ce sont les moutons femelles qui y sont.

Un royaume symbolisé par un mouton femelle n’est-ce point une pointe d’humour ! La revanche de l’histoire ! Celle des femmes sur les hommes ! (O....K.... ! j’arrête ce développement !)

Mais revenons à ce jugement dernier. Il révèle un message rarement souligné : la beauté du caractère du Christ et la profondeur de son amour pour notre humanité. Cette appréciation est très éloignée des caricatures grotesques faites par ces petits soldats de la loi et de l’inquisition dont l’histoire compte parfois les mérites.

Le roi, certes sépare (sens de mettre à part) brebis et boucs, mais la suite nous démontre que cette séparation n’est que la conséquence de choix faits par les intéressés eux-mêmes. (Versets 35, 36, 42,43) Autrement dit, cette mise à part n’est que la confirmation de choix personnels. Notre liberté sera complètement respectée. Personne n’entrera contre son gré dans le royaume de Dieu.

 

 La preuve est dans la fin du récit : « Et ils s’en iront ceux-ci à un châtiment éternel mais les justes à une vie éternelle  » v.46

 

  Ils s’en iront (le verbe grec est au futur, il peut aussi être traduit par s’éloigner, partir). Ils ne sont pas jetés, poussés comme des balayures. Ils s’en vont eux-mêmes, constatant que ce n’est pas leur place. (Ils n’ont pas voulu être avec le Seigneur dans une relation de désir. Ils l’ont décidé ainsi ! Quel respect du choix de l’homme ! Quel remarquable processus décisionnel où chacun prononce son  propre verdict. La question essentielle est donc de savoir si on veut partir ou rester avec Dieu.)

  Il faut beaucoup d’amour pour laisser partir celui ou celle que l’on a beaucoup aimé !

 Cette grandeur de Dieu dans sa relation à l’humain m’émeut en profondeur. En vérité, le jugement dernier est une clarification de notre vouloir dans la relation à Dieu. Il ne fait que redire, où chacun veut aller, et ce qu’il veut faire de son avenir. Il n’y a rien de pesant dans le sens où chacun doit assumer ses choix.

La présentation de l’enfer aux peines éternelles est une invention humaine. Cela tendrait à montrer un Dieu impuissant à rendre une vraie justice. Certes, il est parlé du feu de la géhenne, mais c’est une image symbolique qui renvoie à la purification de la terre annoncée par l’apôtre Pierre. (cf. 2 Pierre 3 :4-7,10-13). Pour ma part, seules, les conséquences de nos choix seront éternelles !

Ce passage solennel révèle qu’il n’existe que deux voies (Cf v. 34 et 41). Elles sont déterminées par deux choix opposés. Choisir est notre lot. Il est indispensable pour vivre et pour aimer. Le non choix est un choix négatif car il est refus d’assumer sa liberté. Et si on ne veut pas l’assumer, alors la liberté ne sert à rien. On n’existe plus en vérité. Comme on le dit dans les milieux très tendance de notre intelligentsia : La philosophie de l’espérance doit faire place à la philosophie de la responsabilité. D’accord, mais rien ne dit qu’elles sont à opposer ! Dans la Bible elles sont complémentaires.

Il est indispensable d’oser un choix libre et d’en assumer les conséquences. Oser, choisir avec son cœur, son intelligence tout ce qui nous parait bon à notre développement physique, mental et spirituel. Ce choix fondamental, dans cette parabole, se manifeste principalement dans la relation à l’autre (Christ- prochain) par des actions concrètes :

-Donner à manger, à boire, vêtir, recueillir, rendre visite -

 

Ce qui est vrai, ne relève ni du discours, ni de la connaissance formelle, mais de l’expérience dans le concret de la vie simple, vraie, belleNos bonnes motivations doivent muter en actes.

 

Or la valeur de la relation est en fonction de ce que l’on donne au moindre, au plus petit (v.40), avec de l’accueil, de la disponibilité, de la dignité, des biens...L’apôtre Jean dit

 

 : « N’aimons pas en paroles et avec la langue, mais en actions et avec vérité ». 1 Jean 3 : 18

 

L’amour fait sortir de l’ego. Il est mû par une force spirituelle qui nous recentre sur l’autre, notre frère, notre proche. Notre responsabilité est sollicitée dans l’attention  portée à l’autre, notre proche, notre frère. En agissant ainsi nous entrons  dans l’esprit de la loi divine. Nous avons tous besoin d’amour pour vivre. Salomon, parlant par expérience, le place au centre de la vie relationnelle : « l’amour couvre toutes les fautes » (Proverbes 10 :12 ; cp. avec Jacques 5 :20 ; 1 Pierre 4 :8).

 

Nous aurons à assumer nos propres choix, d’où l’importance d’être au clair sur les réelles motivations qui conduisent nos décisions. N’oublions jamais que l’Eternel regarde moins nos capacités, nos talents, que nos cœurs.

Mais en fait, qu’impliquent concrètement les bons choix en regard de cette parabole.

 

Verset 35 «  J’ai eu faim... » La famine n’a pas disparu, encore aujourd’hui des personnes meurent de faim dans nos cités, et que dire ailleurs ! La vraie famine est d’ordre spirituelle. Elle est à notre porte. Sommes-nous disposés à partager ce que nous avons reçu ? Ou est-ce le chacun pour soi ? Est-ce le sauve qui peut, à l’orée d’un siècle qui va être terrible en tensions, en violences, en désespoir ? Le final du genre humain se met en place ! Qui veut distribuer ce qui nourrit complètement  et redonne force, espoir et vie? Qui ?

 

« J’ai eu soif... » Bien sur, l’eau devient une denrée rare, mais au-delà de cette réalité physique, il y a pire. Le refus et le rejet de Dieu conduiront le monde à la famine et à la soif spirituelles. Le sens des valeurs disparaîtra devant les impératifs de survie au quotidien. La fin justifiera les moyens. (cf. Amos 8 : 11-13 ; Matthieu 24 :12,22)

Pendant qu’il en est encore temps, assumons un choix responsable tel que Paul le présente :

 

« Si ton ennemi a faim, donne lui à manger ; si il a soif donne lui à boire...Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais surmonte le mal par le bien ». Romains 12 : 20-21

 

Qui veut être porteur d’eau vive, comme Jésus, face à la samaritaine ? Qui ?

 

«  J’étais étranger...» Quelle brûlante actualité ! Certes la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, mais ceux qui sont là et qui, au milieu de nous, veulent vivre normalement, comment nous comportons nous avec eux ? Souvenons nous que l’accueil de l’étranger est une constante dans la démarche biblique, depuis ses origines. Qui veut inviter ces gens à un repas ? A un moment convivial ? Qui ?

 

«  J’étais nu... » Au-delà de l’aspect vestimentaire, la vraie nudité existe aussi. Des gens au départ comme vous et moi ont été privés de l’essentiel de vie, du jour au lendemain. Dépossédés de tout le nécessaire vital, ils n’ont plus le  désir de vivre. Ils errent, traînant leur mal-être, ou se détruisent pour ne plus penser. Ils meurent à petit feu, parce qu’ils ne se sentent plus aimé. Qui peut les remettre sur le chemin de la dignité, de l’espoir et de l’amour ? Qui ?

 

« J’étais malade... » Le cortège de souffrances, malgré tous les progrès de la médecine, ne fait que s’allonger. Que de misères ! Et puis, tous ces drames, ces génocides, ces conflits incessants ! Et autour de nous, qui veut donner un peu de son temps pour accompagner ceux et celles sont qui sont en détresses de toutes natures ? Qui?

 

«  J’étais en prison... » Là encore, les vrais prisonniers ne sont pas là où on le croit ! Ils ne sont pas tous derrière les mêmes barreaux... Elles existent pourtant ces prisons modernes sans barreaux... Le monde n’en a jamais autant recensé. Qui apportera la joie de la vraie liberté ? Non pas celle qui consiste à faire tout ce que l’on veut, quand on veut et comme on veut, mais tout ce qui est utile pour soi et son prochain. Dieu n’a-t-il pas indiqué le chemin ? La vraie libération est donnée par Jésus-Christ. Livrés à nous-mêmes, nous ne savons pas discerner finement ce qui est bon pour nous. Pourquoi dès lors, ne pas accepter une aide extérieure et mettre notre orgueil à la poubelle ?

Qui, par son témoignage va donner envie de vivre cette libération merveilleuse en Jésus-Christ ? Qui ?

Comme nous le constatons, Jésus a centré son message sur le concret de la vie, non sur sa dissertation. Seront déclarés justes ceux qui auront accepté le Christ comme leur Sauveur personnel.

 

 Le mot grec δικaιος= juste, a les 2 sens : juridique et théologique (cf. v.46)

 

a)    sens juridique : celui qui ne se trouve pas sous la condamnation de la loi. (Par substitution de peine, le Christ nous délivre de cette condamnation incontournable qui pesait sur nous. Voire1 Jean3 : 1-11)

b)    Sens théologique : ceux qui auront fait acte de foi pour ne plus être sous la condamnation de la loi. (voire Romains 8 :1-4, 11, 24,28)

 

Répétons-le, Le jugement dernier sera, tout simplement, le prolongement de nos choix, la conséquence de nos choix. Ces derniers concernent directement notre positionnement dans nos relations les uns avec les autres et avec Dieu. (cf. v. 40,45)

Le développement de la parabole déroute quelque peu, puisque ceux et celles qui ont pratiqué ce que Jésus recommande, n’ont pas eu conscience d’agir de la sorte. Autant dire que ces personnes ont œuvré sans calcul, spontanément, naturellement dans l’amour. Elles ne se sont pas interrogées  pour savoir si elles accomplissaient  le bien, elles l’ont vécu avec simplicité. Nous sommes très loin de tous ces marchands d’illusions qui veulent vendre le paradis ! Et que dire de tous ceux et celles qui font des calculs pour gagner le ciel !

Plus généralement, l’étonnement des uns et des autres est significatif : « Quand Seigneur t’avons-nous vu avoir faim ?... » v. 37, 44

Apparemment, personne n’a été conscient de la portée de ses gestes. C’est peut-être mieux ainsi, du moins, pour ceux qui ont bien vécu, mais pour les autres, c’est dramatique. Ils seront passés à coté de l’essentiel de la vraie vie ; Ils se seront beaucoup souciés de leur réussite, de leur prospérité. Ils auront été toujours très occupés par tous leurs projets, le profit et l’appât du gain. Centrés sur eux-mêmes, ils auront fait le choix de ne dépendrent que d’eux seuls... Ils finiront aussi seuls.

 

Le Seigneur leur dira : «  Allez loin de moi... » v.  41 

 

Autrement dit, allez dans la direction que vous avez choisie. Vous n’avez pas voulu être en relation avec moi, soit ! Vous pouvez partir ! J’imagine que Jésus comme face à Jérusalem leur dira ces derniers mots d’amour :

 

 « Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois j’ai voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes ! Mais vous ne l’avez pas voulu. Eh bien, votre maison vous est laissée déserte ». Matthieu 23 : 37-39.

 

La puissance d’amour du Christ aura été en constat d’échec, face au principe souverain de la liberté individuelle. Je ne pense pas que nous puissions prendre conscience de la souffrance que cela occasionnera au Christ à cet ultime instant. (Il n’a pas créé pour détruire ! Cf. Jean 1 :1-13)

Ce  récit nous dit clairement que le repli sur soi est chemin de mort ; que l’ouverture à soi et aux autres est chemin de vie.

Si nous choisissons la vie, notre choix est certes simplifié, mais l’aventure ne fait que commencer (Cf. Deutéronome 30 :19-20). Elle nécessite, ne nous leurrons pas, constance et persévérance pour aller jusqu’au bout de cette épopée avec la force d’aimer (Cf. Matthieu 24 :13)  Ce que Dieu nous demande de vivre n’est pas au dessus de nos forces, car Il nous donne les moyens de réaliser nos rêves. (Cf. Deutéronome 30 :11- 14) Il me plait à penser que cette aventure n’aura jamais de fin.

Alors pourquoi ne pas décider d’aller dans la direction de cette relation qui  apporte joie, bonheur et paix, malgré de réelles et nombreuses difficultés, malgré les déceptions, bref malgré tout.

 

Conclusion :

 

Nous avons tous besoin d’un idéal qui nous élève et nous transcende ; D’une aventure qui nous permette de nous réaliser pleinement, afin de nous faire parvenir à la maturité d’être. Les petits  boucs seront du mauvais coté, parce que quelque part, ils auront refusé de grandir, refuser d’assumer un vrai choix engageant et responsable, refuser d’avoir de l’aide, refuser de se voir tel qu’ils sont, refuser leur constat négatif d’une vision infantile, jouissive et matérialiste. 

La vie n’a de sens qu’en allant au-delà du visible, au-delà de nous-mêmes, au-delà de tous nos égoïsmes, au-delà d’une vision petits bras.

Ce récit du jugement dernier révèle une attitude du Christ pleine de compassion, très éloignée du juge insensible et implacable.

Dieu nous aurait-il créé pour nous faire périr, c’est absurde ! Tous ceux qui croient que Dieu nous attend au tournant, pour nous sanctionner, même si cela peut les réconforter de le penser, sont  mal informés. Ils se seront trompés dans la lecture des évènements de l’histoire...

Notons enfin, que les brebis et les petits boucs ont tous été surpris par les critères d’évaluation. Il n’y a pas ceux qui savent et agissent, et ceux qui ignorent et reçoivent le salaire de leur égarement. Tous sont surpris par les critères de référence à la relation à autrui. Ce qui me fait dire que les chrétiens ne sont pas meilleurs que les autres, la seule différence, et elle est de taille, est qu’ils le savent et s’en remettent à Dieu pour mieux inspirer leurs  motivations. Le Seigneur de gloire de la parabole veut accepter dans son royaume tous ceux qui l’auront ardemment désiré. Seront déclarés justes, ceux qui auront accepté le Seigneur comme leur Sauveur personnel.

Ce choix déterminant, pour notre présent et notre futur, nous appartient. A nous de savoir profondément ce que nous voulons, et de nous donner les moyens de stopper notre course effrénée, souvent vide de sens, pour  prendre le temps d’une bonne réflexion. A nous de prendre la meilleure décision pour être heureux ici et maintenant avec la perspective d’une continuité…

 

«  C’est avec le cœur qu’on a la foi qui mène à la justice, et c’est avec la bouche qu’on fait acte de reconnaissance qui mène au salut » Romains 10 :10-11 (version Nouvelle Bible Segond ed.2002)

 

 

                                       Jacques Eychenne

 

 

 

 

   

 

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