Jonas le prophète obéissant

 

            JONAS

                                ou

  le prophète obéissant        

        Jonas chapitre 3

Introduction :

 

Du fond du ventre du poisson, Jonas comprend ses erreurs et prie. Dieu qui veillait sur lui, étant attentif à sa moindre prise de conscience, entend sa prière. Il reconnait son cri de détresse. Il disait son espérance et sa foi en ce Dieu qu’il avait voulu fuir. Du fond de la mer, Jonas proclame haut et fort :

« De Yahvé vient le salut. Yahvé commanda au poisson, qui vomit Jonas sur le rivage » Jonas 2 : 10-11, version FBJ.

 

Il s’est enfin adressé à Dieu ! Il est revenu vers Lui, comme l’apôtre Pierre reviendra vers le Seigneur après son reniement (cf. Luc 22 : 32). Et Dieu a répondu concrètement en le sortant physiquement d’une situation de mort certaine. Rappelons que YHWH-Adonaï a toujours veillé sur son prophète. Il ne l’a jamais perdu de vue. Il l’accompagne dès le début. Il est avec lui quand Jonas descend au port de Jaffa. Jonas a pensé qu’il lui suffisait de fuir et de se cacher au fond d’une cale de bateau pour échapper au regard divin. En s’endormant profondément en pleine tempête, il pensait avoir régler le problème (cf. Jérémie 23 : 24). Mais Dieu est toujours là dans la tempête (cf. Jonas l’affirme aux marins qui s’interrogent sur le pourquoi de leur situation), il est encore là au fond de la mer, Il le suit dans le ventre du poisson et reçoit positivement sa prière. Dieu n’est point humain pour se lasser ! Ce simple constat devrait encourager tous ceux et celles qui sont en recherche d’un bon chemin de vie…

 

Alors, le Créateur de l’univers ordonne au poisson de déposer Jonas sur le rivage. Et le poisson s’exécute en vomissant (verbe dans l’original) l’intrus. Jonas bien éprouvé par cette expérience hors du commun, quelque peu encore sans force, entend de nouveau, pour la seconde fois l’appel de Dieu. Le Tout-Puissant est aussi persévérant ! Quand sa parole est proclamée, il faut qu’elle chemine jusqu’à atteindre son objectif. Même si Yhwh-Adonaï ne se lasse pas de pardonner (cf. Esaïe 55 : 7b), il ne se lasse pas aussi d’agir. Comme un bon pédagogue, il réitère sa volonté de voir son serviteur se lever et aller à Ninive pour proclamer ce qui lui dira…

 

Développement :

 

« La parole de Yahvé fut adressée pour la seconde fois à Jonas : « Lève-toi, lui dit-il, va à Ninive, la grande ville, et annonce-leur ce que je te dirai. » Jonas se leva et alla à Ninive selon la parole de Yahvé. Or Ninive était une ville divinement grande : il fallait trois jours pour la traverser.

 Jonas 3 : 1-3, version FBJ.

YHWH-Adonaï interpelle son envoyé pour la deuxième fois. Sa démarche est

empreinte de miséricorde. Mais quand Dieu parle, il responsabilise aussi. Il ne parle pas en vain, même si l’humain a cette incurable indigence à faire la sourde oreille.

« Dieu parle une fois, et deux fois et l’on n’y prend pas garde » Job 33 : 14, version DBR. Encore faut-il que l’on prenne le temps d’écouter, c’est-à-dire : faire silence, pour discerner la nature du message. En fait, YHWH-Adonaï n’a jamais cessé de parler. N’est-ce pas parce que tous les bruits de la terre parasitent ses appels que nous avons tous du mal à entendre ?

Dieu a demandé à Jonas de se lever et d’aller à Ninive…

Tout comme pour d’autres prophètes (cf. Moïse Exode 8 :16 ; 9 : 13 ; Josué, Josué 7 : 13 ; Elie, 1 Rois 19 : 5 ; 21 : 18 ; Ezéchiel, Ezéchiel 3 : 22 etc.) l’injonction divine est claire : il faut se lever et aller. Se lever, c’est adopter la posture pour se mettre en marche. Être debout, c’est encore adopter la bonne attitude des vainqueurs :

« Veillez donc et priez en tout temps, afin d'avoir la force d'échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l'homme. " Luc. 21 : 36, version FBJ.

La vie étant mouvement, Jonas est prié de se mettre en route pour aller porter un message d’espérance à ceux qu’il considère comme des « païens », pour ne pas dire des barbares cruels. Pour un prophète d’Israël, on n’imagine mal sa difficulté de trouver une explication raisonnable et rationnelle à son ordre de mission. Que de questions ont dû traverser son esprit ? Il en est de même quand nous ne comprenons pas ce qui nous arrive. Notre réflexe n’est-il pas de crier à l’injustice ?

Pour Jonas l’objectif est clairement explicité : il faut aller à Ninive, la grande ville. (Ninive était la capitale de l’empire assyrien. Les archéologues ont découvert qu’elle faisait bien partie de ces grandes cités de l’antiquité. Le bien connu André Parrot (archéologue français, qui a aussi été pasteur. 1901-1980) a été le premier directeur du Musée du Louvre à Paris. Il a mesuré et décrit la superficie de Ninive : 1000 km2. Elle formait un triangle dont l’un d’eux comportait une muraille d’environ 12 km, cf. Nouveau dictionnaire biblique, Editions Emmaüs, 1992, p.908-910. De plus, un historien du premier siècle avant J.C., Diodore de Sicile, affirme que la ville mesurait 480 stades, soit environ 100 km, certainement avec sa grande banlieue. D’autres sources parlent de la bibliothèque de cette grande ville. Elle comptait plus de 25000 ouvrages sur tous les sujets. Véritable encyclopédie des connaissances du monde de cette époque).

Dès lors, on n’est pas surpris qu’il faille trois jours pour la sillonner de long en large !

Jonas est maintenant décidé, malgré ses réticences non-avouées, à obéir à l’appel de Dieu. De ce fait il remplit bien sa fonction de prophète. Et quel prophète ! Le premier à être envoyé physiquement en terre « païenne ». Jusqu’à présent tous les prophètes qui l’ont précédé se sont toujours adressés aux peuples d’Israël et de Juda en langue du pays (cf. En Hébreu. Pratiquement tous les petits prophètes, et avant eux Amos, Elie, Elisée, Esaïe etc…).

Jonas part sans savoir exactement ce qu’il va devoir annoncer aux habitants de Ninive. Yhwh-Adonaï lui révèlera le contenu de sa proclamation sur place. Au premier appel (cf. Jonas 1 : 1-2) une précision lui avait été donnée « annonce-leur que leur méchanceté est montée jusqu’à moi » Jonas 1 : 2, version FBJ. Mais cette seconde fois, le prophète doit faire totalement confiance à son Dieu. Nous ne savons pas si Jonas part le cœur léger, heureux d’avoir retrouvé la paix avec son Dieu…

Cependant, les récits des prophètes qui ont décrit les atrocités des habitants de Ninive devaient être bien présentes dans son esprit. Il est impensable qu’il n’en soit pas ainsi (cf. Esaïe 30 : 27-33 ; 31 : 8-9 ; 37 : 19). L’Assyrie était une menace pour le tout petit royaume d’Israël. L’Assyrie était connu comme un pouvoir tyrannique, imbue d’orgueil et d’injustice. Mettre les pieds sur ce territoire n’était donc pas sans risque !  

Un peu comme Elie, contraint de repartir vers Damas après avoir entendu l’appel divin, Jonas doit rebrousser chemin (et aller cette fois à Ninive). Cette expérience nous interpelle, car nos parcours de vie ne sont jamais en ligne bien droite.

Jonas part loin vers une terre étrangère. Connait-il seulement la langue du pays ? Nous ne le savons pas. Par contre, la distance est impressionnante : 900 km au bas mot en ligne droite. Ce qui veut dire, plus d’un mois de marche sans faire de pose. Je précise ce point pour nous éveiller à tout ce qui a pu traverser l’esprit du prophète pendant son périple. Il convient de rappeler que les routes de cette époque n’étaient pas sûres. De plus, les zones désertiques à traverser étaient nombreuses. (Le terrain est accidenté. Il suffit de prendre un atlas ou de refaire le parcours avec l’application « Google Earth »  pour s’apercevoir de la complexité du trajet).

 

En mettant l’accent sur le concret de l’ordre divin, nous pouvons entrevoir les immanquables murmures du prophète. Ils nous renvoient à l’épopée du peuple d’Israël au sortir de l’Egypte. Mais aussi à toutes les questions qui nous viennent aussi à l’esprit ! Par exemple, pourquoi YHWH-Adonaï n’est-il pas intervenu directement et personnellement pour parler à ce peuple assyrien ? Pourquoi faire venir un homme habitant à près d’un millier de kilomètres ? Pourquoi n’avoir pas choisi du sein du peuple assyrien quelqu’un de réceptif à son message ? La prédication d’un citoyen assyrien n’était-elle pas préférable à un membre de ce peuple gênant que représentait Israël ? Pourquoi n’avoir pas choisi un prophète dans la tribu de Juda, avec Esaïe par exemple ? ne prophétisera-t-il pas sur le pouvoir assyrien ? (cf. Esaïe 37 : 21-38) Cela nous renvoie à toutes nos questions et toutes nos contestations quand nous ne comprenons ce que Dieu veut nous dire…

La position de YHWH-Adonaï n’a pas varié au cours des siècles :

 

« Que le méchant abandonne sa voie, Et l'homme d'iniquité ses pensées ; qu'il retourne à l'Éternel, qui aura pitié de lui, à notre Dieu, qui ne se lasse pas de pardonner. Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies, dit l'Éternel. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies, et mes pensées au-dessus de vos pensées » Isaïe 55 : 7-9, version NEG.

 

Jonas est arrivé à Ninive. Il commence sa proclamation insolite une seule journée, dit l’original hébreu. D’autres traductions laissent entendre qu’il commence par une marche d’un jour. Est-ce pour tâter le terrain ? Voir les premières réactions ?

Humainement cela s’entend. Malgré ses doutes, Jonas crie :

 

« Encore quarante jour et Ninive sera détruite » Jonas 3 : 4, (cf. renversée dans l’original hébreu).

 

Ce message semble au départ contraire au nom que porte Jonas. La colombe n’était-elle pas symbole d’espérance ? (cf. Genèse 8 : 8-12 ; Matthieu 3 : 16). Une colombe annonçant une destruction, c’était du jamais vu !

 

 « Encore quarante jour… ».

L’adverbe de temps est important. Il figure bien dans le texte original hébreu. Il explicite toute la miséricorde divine. Dieu ne prend pas l’humain par surprise. Il laisse un temps de la réflexion. Même envers de ceux qui pratiquent des actions odieuses. C’est tout le fond du message d’appel à la repentance que nous retrouvons synthétisé dans cet adverbe. Puis, le texte mentionne 40 jours. On peut s’étonner de ce laps de temps. Dans la Bible, il est le plus souvent symbole du temps de l’épreuve (cf. Genèse 7 : 4 ; 8 : 6 ; Exode 16 : 35 ; 1 Rois 19 : 8 ; Ezéchiel 4 : 6 ; Luc 4 : 2 ; Actes 1 : 3).

Jonas a accepté que sa foi soit mise à l’épreuve. Je suis convaincu que nous ne nous représentons pas le courage qu’il a fallu au prophète pour proclamer la destruction de la capitale de ses ennemis. Si nous devions actualiser nous serions surpris du résultat ! Allez prononcer un tel jugement, alors que ce peuple cruel servait d’autres dieux, c’était de la folie ! A chaque pas, il risquait d’être lapidé !

Et pourtant l’impensable s’est produit : les ninivites ont cru, non la parole de Jonas, mais à Celui qui l’avait initiée, c’est-à-dire, un Dieu qui leur était étranger. Cela en dit long sur la pédagogie divine. Ce n’est jamais le messager qui est important, mais le message. Il le porte de la part de YHWH-Adonaï. Cela met à bas toutes nos ambitions ! Cela réduit tous nos tropismes à néant !

 

Observons que ce sont les gens du peuple qui ont réagi positivement aux cris de Jonas. D’ordinaire, en Israël et même en Juda, le peuple suivait les agissements de leur roi. Ils se rendaient complices du bien ou du mal qu’il leur indiquait. Ici, c’est tout le contraire. C’est le peuple qui prend le pouvoir avec une détermination sans restriction. L’émoi spirituel de la population est considérable. Ce n’est pas tant la vue d’un étranger que l’on voit passer, c’est la puissance de son message que l’on entend. Il brise les cœurs des ninivites. Chacun se voit tel qu’il est et se repent. Cette irréfragable émotion parvient au roi. Il aurait pu la bloquer. Il avait les moyens de briser cette insurrection pacifique et spirituelle ! Non seulement, il n’en fit rien, mais mieux encore, il l’accueille et épouse personnellement la cause de ses sujets. Le fait est assez remarquable dans l’histoire des peuples pour le souligner. (Toutefois, cela n’empêchera pas Ninive d’être détruite quelques années plus tard par les Babyloniens).

Le roi de Ninive après s’être levé de son trône, avoir ôté son habit royal, s’être couvert d’une étoffe de deuil, s’assit sur la cendre (cela faisait partie des rites de pénitence et de deuil ; dans les trois religions monothéistes ces rites demeurent sous des pratiques variées). Toutes ses prérogatives de monarque absolu ont fondu comme neige au soleil. Le roi a accepté d’être visité par l’Esprit de Dieu, et il a agi en conséquence. (Si les dirigeants de notre monde pouvaient en faire autant !).

Aux cris de Jonas, la publication du roi fait écho :

 

Il « proclama l'état d'alerte et fit annoncer dans Ninive : « par décret du roi et de son gouvernement, interdiction est faite aux hommes et aux bêtes, au gros et au petit bétail, de goûter à quoi que ce soit ; interdiction est faite de paître et interdiction est faite de boire de l'eau. Hommes et bêtes se couvriront de sacs, et ils invoqueront Dieu avec force. Chacun se convertira de son mauvais chemin et de la violence qui reste attachée à ses mains. Qui sait ! peut-être Dieu se ravisera-t-il, reviendra-t-il sur sa décision et retirera-t-il sa menace ; ainsi nous ne périrons pas » Jonas 3 : 7-9, version TOB.

 

Le décret du roi paraît excessif, les bêtes n’y étaient pour rien !

 

Toutefois ce détail a sa place dans l’interaction de l’homme avec son environnement. Cela nous renvoi peut-être à notre responsabilité. Elle dépasse notre propre personne. En fait, les ninivites revivent la prise de conscience de Jonas dans le ventre du poisson. Ils sont sollicités à expérimenter la conversion qui devrait les conduire à renoncer à leurs mauvaises pratiques et à l’utilisation de la violence.

Puis, le monarque espère, et investit dans le pardon divin. Il a bien compris que toutes ses actions passées pouvaient conduire à la mort. Reconnaître la paterné divine d’un dieu étranger et accepter de suivre, en harmonie de vie, ses directives est un exemple à suivre. Plus tard, le roi Babylonien Nabuchodonosor en fera aussi l’expérience face au témoignage de Daniel et de ses compagnons (cf. Daniel 4 : 1-3). Si tous les tyrans et despotes de notre belle planète bleue pouvaient entendre la voix divine !

 

Conclusion :

 

Là encore, que ces faits soient réels ou fictifs, qu’importe ! Pour l’heure, c’est le message qui s’en dégage qui est essentiel. Il demeure d’une saisissante actualité. Notre monde est de plus en plus contaminé par le virus de la violence. Il semblerait que ce soit le dernier recours pour se faire entendre, tellement les relations humaines se sont dégradées. Notre environnement naturel subit les conséquences de nos actes irresponsables. Sans un changement radical de comportement, nous allons tous à la catastrophe.

Pourquoi ne pas être sensible à une parole divine ? Dans notre récit Dieu et Jonas ont très peu parler, mais ce qu’ils ont dit a été efficace. Si des gens sans foi, ni loi comme les ninivites ont pu être touchés par une parole, il y a de l’espoir pour chaque individu de notre planète. Ils ont investi dans le pardon de Dieu. Un jour le monde s’apercevra que c’est notre seul recours ! Encore faut-il que tous nos masques tombent et que nous reconnaissions que la Parole de YHWH-Adonaï est la seule vraie Parole de vie. Peut-être accepterons-nous de nous couvrir du sac de l’humilité, sur la cendre de toutes nos vaines prétentions, dans le jeûne d’une purification intérieure, porteuse d’espoir. Alors, comme le monarque assyrien, nous pourrons compter sur le pardon du Créateur des cieux et de la terre.

 

« L’engagement, le sentiment de mission, et le don doivent naître non pas d’une preuve, mais d’une intime conviction, qui repose à la fois sur un élan intérieur et sur un risque » Antoine de Saint-Exupéry. (à suivre Jonas chapitre 4).

                                                                               

                                                                                

                                                                                      Jacques Eychenne

 

 

 

 

PS : FBJ, version Française de la Bible de Jérusalem ; NEG, version Nouvelles Editions de Genève ; TOB, version de la Traduction Œcuménique de la Bible.

 

 

 

 

 

 

 

 

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