Sous la Grâce, avec ou sans la Loi ?

 

 

 

 

                Sous la grâce,

 sans, ou avec la loi ?

       Jean 15 : 10

 

Introduction :

 

Lundi dernier, comme tous les lundis en ce moment, j’animais une émission sur la radio Agapè de Marseille à 20 h. A cette occasion, j’ai présenté le sujet des deux alliances dans la Bible (cf. l’ancienne et la nouvelle).  A la suite de l’exposé, une auditrice m’a posé la question suivante : « comment pouvez-vous dire que l’ancienne alliance complète la première et que l’on ne peut connaître la nouvelle qu’à la lumière de l’ancienne ? Quand une maison change de propriétaire l’ancien s’en va et c’est le nouveau qui en prend possession ! ». La réaction de cette auditrice peut laisser entendre que la grâce exclue la loi. Est-ce bien le cas dans le Nouveau Testament ?

A l’évidence, les écrivains de la nouvelle alliance révèlent le contraire, et nous allons le démontrer par l’analyse des textes. Disons  de suite, par un raisonnement de bon sens, que la grâce ne peut exister que s’il y a une loi. La loi active la grâce et la grâce devrait renforcer le respect du sens profond de la loi. D’un point de vue logique, la grâce n’aurait pas eu sa raison d’être sans la loi. Cela paraît simple à dire, mais cela ne semble pas évident pour tous les chrétiens…

L’histoire des religions démontre que ce sujet important a divisé et divise encore les peuples croyants. Pour les uns le salut de l’être humain ne peut s’obtenir que par une obéissance stricte à la loi divine, pour d’autres, il est l’œuvre de l’unique grâce de Dieu. Ainsi, sont dos à dos juifs , musulmans et chrétiens, mais aussi de nos jours les chrétiens entre eux.

Dans un esprit non polémique - nous respectons le point de vue de tous - il est de notre responsabilité de nous confronter à l’enseignement du Christ et des Apôtres sur cet éminent sujet. Je sais qu’il relève spécifiquement de la  théologie et que cette dernière n’intéresse pas le citoyen lambda, mais essayons quand même de comprendre…

 

Développement :

 

D’emblée, posons-nous la question suivante : la condition spirituelle de l’être humain a-t-elle changé depuis la rupture du contrat-confiance en Eden par nos premiers parents ? La réponse objective est non ! Le Christ l’affirme lui-même : « je ne suis pas venu appeler des justes mais des pécheurs » Marc 2 : 17. Aux chrétiens de Rome, l’apôtre Paul confirmera : « C'est pourquoi, comme par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort s'est étendue sur tous les hommes, parce que tous ont péché… »  Romains 5 : 12, version de Genève.

 

Comment dès lors savoir si nous sommes pécheurs ?

 

La réponse est aussi claire que lorsque vous recevez une contravention pour excès de vitesse. Si vous dépassez les normes autorisées (en France 90 km/h, en général, sur les routes nationales et départementales), vous êtes pénalisables. Spirituellement parlant, il en est de même : on peut savoir si nous sommes pécheurs, en nous situant devant la loi divine (qui est un code de bonne conduite) : « le péché n'est pas imputé, quand il n'y a point de loi »  Rom 5 : 13, version de Genève. Cette affirmation de l’apôtre Paul est d’une logique cristalline. L’apôtre Jean soulignera le fait : « quiconque pratique le péché transgresse la loi, et le péché est la transgression de la loi » 1 Jean 3 : 4.

C’est précisément parce que nous sommes sous le coup de la loi que le Christ est venu dans ce monde. Sa venue a eu pour objet de nous libérer des conséquences de cette transgression : « car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu; et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus -Christ. C'est lui que Dieu a destiné à être par son sang pour ceux qui croiraient victime propitiatoire, afin de montrer sa justice, parce qu'il avait laissé impunis les péchés commis auparavant, au temps de sa patience;  il montre ainsi sa justice dans le temps présent, de manière à être juste tout en justifiant celui qui a la foi en Jésus. Où donc est le sujet de se glorifier ? Il est exclu. Par quelle loi ? Par la loi des œuvres ? Non, mais par la loi de la foi » Romains 3 : 23-27 version de Genève.

 

Ce même apôtre explique nettement que le but de la loi n’est pas de nous justifier. C’est même l’inverse. Le rôle de la loi est de mettre en évidence sa transgression (appelée : péché). Rappelons pour mémoire le sens du verbe pécher= ἁμαρτάνω= manquer le but, rater la cible, dévier, se tromper. Par extension : commettre une faute. Comme pour le lancement d’un satellite ou d’une fusée, s’il y a déviance par rapport à la trajectoire programmée, il faut que les ingénieurs la corrigent rapidement. C’est justement ce que le Christ est venu faire pour nous : nous repositionner dans la bonne trajectoire de la vie. Elle a pour vocation d’être éternelle. L’apôtre Paul explique au travers de son témoignage le processus de cette   impérieuse correction de trajectoire : « Nous savons, en effet, que la loi est spirituelle; mais moi, je suis charnel, vendu au péché. Car je ne sais pas ce que je fais: je ne fais point ce que je veux, et je fais ce que je hais. Or, si je fais ce que je ne veux pas, je reconnais par-là que la loi est bonne. Et maintenant ce n'est plus moi qui le fais, mais c'est le péché qui habite en moi. Ce qui est bon, je le sais, n'habite pas en moi, c'est-à-dire dans ma chair: j’ai la volonté, mais non le pouvoir de faire le bien…  Misérable que je suis ! Qui me délivrera de ce corps de mort ?... Grâces soient rendues à Dieu par Jésus -Christ notre Seigneur ! » Romains 7 : 14-18, 24-25, version de Genève.

 

Ainsi le Christ est venu pour nous faire triompher par la foi de la condamnation de la loi. Toute la gloire lui en revient, et nous n’avons aucun mérite à présenter. Seule l’acceptation de son sacrifice nous acquitte. C’est le Christ qui nous offre sa victoire sur le mal : « ô mort, où est ta victoire ? Ô mort, où est ton aiguillon ? L'aiguillon de la mort, c'est le péché; et la puissance du péché, c'est la loi. Mais grâces soient rendues à Dieu, qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus -Christ ! »  1 Corinthiens 15 : 55-57, version de Genève.

 

Le Christ, initiateur de la nouvelle alliance, a-t-il, de ce fait, aboli la loi ? Le Seigneur répond lui-même : « ne croyez pas que je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes; je suis venu non pour abolir, mais pour accomplir »  Matthieu 5 : 17 , version idem. Si le verbe abolir est facilement intelligible, il faut ne pas se méprendre sur le sens du second verbe : accomplir. Le sens premier de ce dernier a bien été traduit par l’abbé Crampon par le verbe parfaire. Dans l’usage concret du verbe, en grec, il y a la référence à ce qui est rempli à ras bord, plein, complet. En aucun cas, le verbe peut signifier : abroger ou supprimer. La suite du texte serait incompréhensible (cf. Matthieu 5 : 18-32). Elle démontre avec précision dans quel sens le Seigneur a interprété la loi de son Père. Et c’est là, précisément, que se fait la différence entre l’ancienne alliance et la nouvelle entre Dieu et l’humain. Dans l’ancienne alliance tout était en rapport avec l’obéissance à la lettre de la loi, mais depuis la venue du Christ,  nous ne sommes plus sauvés (justifiés) par la loi, mais par la grâce (cf. Ephésiens 2 : 8 ). Cependant, le fait novateur est que cette grâce nous réconcilie et nous renvoie à un approfondissement positif de la loi. Dégagés de la condamnation de la loi divine, nous devrions être plus sensibles au contenu de ce code de bonne conduite. Le Seigneur non seulement n’a pas abrogé la loi   (pouvait-il seulement le faire puisqu’elle émanait de son Père), mais encore, il nous a révélé l’expression profonde de la loi : ce n’est plus l’acte qui est condamnable (cf. A.T), mais la pensée qui précède cet acte (cf. N.T.). L’état d’esprit devient prioritaire dans la Nouvelle Alliance qui dispense la grâce divine.

 

Alors, redisons-le sans ambages, l’acte de foi n’élimine pas la loi, il la rend plus sensible. En ce sens l’ancienne alliance est dépassée et complétée par la nouvelle. La loi conduit à la nécessité d’agir par la foi : «  la loi a été notre conducteur jusqu'à Christ, afin que nous fussions justifiés sur le principe de la foi »  Galates 3 : 24, version Darby.

Quand on dit que l’on ne peut comprendre la nouvelle alliance, qu’à la lumière de l’ancienne, c’est parce que le Seigneur s’est servi des modalités de l’ancienne alliance pour éclairer la nouvelle. Rien que dans l’évangile selon Matthieu, nous  avons une cinquantaine de références aux textes de l’Ancien Testament. Quand Jésus dit : « il est écrit », il ne cite que les rouleaux de la loi et des prophètes (Il y a plus de 285 citations directes de l’A.T dans le nouveau, et si l’on compte les réminiscences (souvenirs imprécis), nous dépassons les 3475 (cf. site internet : https//www.levangile.com).

 

Assurément, c’est le contenu de l’ancienne alliance qui nous permet de mieux cerner le ministère du Christ. Rendons-nous compte : Le Christ est à la fois la victime expiatoire, le souverain sacrificateur, le bon berger et aussi l’agneau immolé qui ôte les péchés du monde (que des illustrations de l’A.T.). Il est donc manifeste que l’emprunt considérable des rouleaux anciens avait pour finalité de zoomer sur la venue du Messie-Sauveur (par exemple, le Christ s’est servi de la pâque juive à laquelle il a participé, pour la transformer en sainte cène).

Si on devait faire des recherches exactes, on s’apercevrait que la nouvelle alliance était déjà programmée avant l’ancienne. La nouvelle est plus ancienne que l’ancienne, comment cela ? Abraham n’a-t-il pas vécu plusieurs siècles avant Moïse ?

« Car ce n'est pas par la loi que la promesse d'être héritier du monde a été faite à Abraham ou à sa semence, mais par la justice de la foi… Pour cette raison, c'est sur le principe de la foi, afin que ce soit selon la grâce, pour que la promesse soit assurée à toute la semence, non-seulement à celle qui est de la loi, mais aussi à celle qui est de la foi d'Abraham, lequel est père de nous tous »  Romains 4: 13,16, version Darby.

Non ! Le Christ n’est pas venu abroger la loi. Il a simplement aboli tout ce qui était propre au fonctionnement du peuple d’Israël, ainsi que tout ce qui annonçait la venue d’un Messie. Son explication aux témoins d’Emmaüs en témoigne : le Christ leur dit « Esprits sans intelligence, cœurs lents à croire tout ce qu'ont déclaré les prophètes! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela et qu'il entrât dans sa gloire?» Et, commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Écritures ce qui le concernait »  Luc 24 : 25-27, version TOB.

 

Non ! Jamais le Seigneur n’a supprimé la loi divine. Tout au plus a-t-il rendu caduc pour les disciples du monde entier, tout ce qui était propre au peuple d’Israël : les lois cérémonielles, le fonctionnement du sanctuaire, les fêtes importantes qui marquaient les temps forts de l’année religieuse, les nouvelles lunes ou les sabbats spéciaux considérés comme jours chômés (ils étaient célébrés en cours de semaine) : « dès lors, que nul ne s'avise de vous critiquer sur des questions de nourriture et de boisson, ou en matière de fêtes annuelles, de nouvelles lunes ou de sabbats. Tout cela n'est que l'ombre des choses à venir, mais la réalité, c'est le corps du Christ. »  Colossiens 2 : 16-17 , version Bible de Jérusalem.

 

Mais attention ! La loi divine des 10 paroles  était distincte de tout le reste du corpus de lois. La preuve nous en est donnée en examinant le mobilier le plus important du sanctuaire israélite dans le désert : l’arche de l’alliance. Dieu se manifestait entre les deux chérubins qui reposaient sur le propitiatoire (couvercle) de l’arche de l’alliance (cf. Exode 25 : 21-22). Les deux tables de pierre de la loi, écrites du doigt de Dieu étaient dans l’arche (cf. Deutéronome 10 : 5 ; 1 Rois 8 : 9 ; Hébreux 9 : 4). Les autres lois, écrites par Moïse, étaient mises à côté de l’arche (cf. Deutéronome 31 : 9-26).

Remarquons que si Dieu a pris soin de distinguer le décalogue des autres lois, ce n’est pas pour que nous en fassions l’amalgame aujourd’hui.

 

Observons d’autre part ce que nous disent les spécialistes de la langue hébraïque : Le mot Torah traduit par le mot français loi est trop réducteur. Le mot Torah a une étymologie beaucoup plus riche qu’en français. Il s’apparente davantage au  terme  de  chemin, voie, mise sur la route, enfantement… Quand Jésus déclare solennellement : « Je suis le chemin, la vérité, et la vie » le juif de l’époque du Christ traduit « Je suis la Torah ». Le terme grec de νόμος (cf. Matthieu 22 : 40) est à penser dans le même sens. De façon identique, le mot grec ἐντολῶν (cf. Matthieu 5 : 19), traduit par ordres, préceptes, commandements, n’est pas à comprendre à la manière militaire, mais sous l’angle de la grâce, de la bienveillance et de l’amour (cf. Jean 14 : 15 ; il faut prendre en compte les progrès de la sémantique des mots).

Méfions-nous de ne pas tenir compte du langage de l’époque et de lui faire dire autre chose ! La vérité n’est point statique, elle advient quand on est dans la marche de la foi !

Ainsi, le Christ n’a jamais abrogé la loi, au contraire il l’a magnifiée : C’est dans le lien de l’amour qu’il en a parlé.

« Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez en mon amour, comme moi j'ai gardé les commandements de mon Père et je demeure en son amour. Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit complète »  Jean 15 : 10, bible de Jérusalem.

Le même apôtre écrira ailleurs : « Nous reconnaissons que nous aimons les enfants de Dieu à ce que nous aimons Dieu et que nous pratiquons ses commandements. Car l'amour de Dieu consiste à garder ses commandements. Et ses commandements ne sont pas pesants puisque tout ce qui est né de Dieu est vainqueur du monde. Et telle est la victoire qui a triomphé du monde : notre foi. Quel est le vainqueur du monde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu ? »  1 Jean 5 : 2-5, version Bible de Jérusalem.

Le Christ n’est pas venu supprimer la loi royale (cf. Jacques 2 : 8). Bien au contraire, il s’est appliqué à nous faire découvrir son vrai sens, en le purifiant de tous les préceptes humains rajoutés par les hommes (cf. Matthieu 7 : 9,13 ;  le sabbat  en est un exemple éloquent ; ce jour-là trente-neuf travaux étaient interdits. De sources rabbiniques, les traités de la Mishna démultiplient ce chiffre cf. Luc 13 : 15-16 ; 14 : 3,5 ; Matthieu 12 : 2 ; Jean 5 : 10,16).

 

Conclusion :

 

A l’évidence, il n’y aurait jamais eu de nouvelle alliance sans une ancienne (cf. Hébreux 9 : 1, 9, 11-12, 15), et de même il n’y aurait jamais eu de temps de la grâce, sans transgressions de la loi.  A la fin de son ministère, Jésus a dit à la foule en parlant des scribes et des pharisiens : « faites donc et observez tout ce qu'ils pourront vous dire, mais ne vous réglez pas sur leurs actes : car ils disent et ne font pas »  Matthieu 23 : 3, version Bible de Jérusalem. Les Juifs ont eu le privilège d’être dépositaires de la loi (cf. Romains 3 : 2), mais pour autant, cela ne les a pas aidés à bien vivre (cf. 2 Pierre 2 : 20-21). Ils ont oublié de la transmettre au monde. C’était cela leur vocation ! 

Le passage entre la lettre de la loi et l’esprit qu’elle contient illustre toute la démarche du Sauveur (cf. Hébreux 8 : 6-17 ; 8 : 6). Il y a un lien étroit (interpénétration) entre la loi divine et la grâce dans le lien de l’amour. La loi divine demeure parce qu’elle nous révèle nos mauvais comportements. Elle nous conduit à Christ, car lui seul nous libère de la condamnation de la loi (mieux qu’une grâce présidentielle !). Répétons-le une dernière fois, c’est cette condamnation qui a été supprimée, mais pas la loi ! Quand on change une vieille voiture pour en avoir une nouvelle, le Code de la route n’est pas abrogé pour autant ! La loi divine est comme un ensemble de panneaux de signalisation en vue d’une conduite bien sécurisée. Elle est l’émanation d’un amour qui laisse chacun se reconnaître pécheur afin d’activer la grâce. Tout est compris dans le mot trop galvaudé de l’Amour. Or, l’amour nous renvoie à la fidélité. Mais attention, la grâce n’est ni un sauf-conduit, ni un concept épicurien (cf. Romains 6 : 15). Si nous avons la joie d’aimer Dieu et son Christ, alors nous garderons ses dix paroles avec respect (plus dans l’esprit que dans la lettre).  Cette garde fidèle dans le bon état d’esprit, soutenu par le Saint-Esprit, est la condition d’exaucement de nos prières (cf. 1 Jean 3 : 22-24) et de la réception de ce bon Saint-Esprit (cf. Actes 5 : 32).

Dieu a parlé. Dix paroles sont gravées dans la pierre. Fasse le Seigneur qu’elles le soient aussi dans nos cœurs. La belle marche de la foi se nourrit de l’approfondissement de cette parole divine. Cette loi parfaite de liberté (cf. Jacques 1 : 25), nous fait cheminer dans la joie…

                                                                                 Jacques Eychenne

 

 

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