Une capitulation sans condition

 

 

 

 

Une capitulation      sans condition      

      2 Rois 5 : 1-19

 

 

Introduction :

 

Jadis, lorsque deux pays étaient en guerre on pouvait observer un vainqueur et un vaincu. La fin des hostilités était actée par un protocole dans lequel le vainqueur édictait ses conditions. Il y avait souvent un préalable. Le vaincu devait accepter une capitulation sans condition. Ce que les humains ont pratiqué pour régler leur situation conflictuelle rejoint un processus analogue sur le plan spirituel. La Bible nous parle aussi de nombreux conflits. La plupart du temps, il s’agit d’une conquête de territoires. Mais sur un plan relationnel plus personnel, nous retrouvons la trace de la nécessité d’une capitulation sans condition. L’être humain, la plupart du temps, se rebiffe contre une telle exigence. Il essaie de s’en sortir tout seul avec en point de mire l’utopie millénaire d’être un jour éternel. Malheureusement la réalité le rattrape en lui rappelant qu’il est bel et bien mortel. Les maladies incurables en sont signes.

La Bible nous rapporte l’expérience significative  d’un chef militaire des armées du roi de Syrie qui illustre notre propos. Examinons ensemble le texte ci-dessus mentionné…    

 

Développement :

 

Que découvrons-nous ? Nous sommes en présence d’un texte surprenant. Naaman, chef des armées du roi syrien Ben Hadad, est l’instrument par lequel Dieu a accordé la victoire aux Syriens au détriment du peuple élu. Il en sera de même quelques siècles plus tard avec Cyrus roi des Perses ; il sera même déclaré l’oint de l’Eternel ! Les choix divins prennent souvent notre raisonnement à revers…  

Naaman était un courageux guerrier, mais il était aussi au service d’une nation aux pratiques idolâtres...

Première surprise dans ce récit : Dieu a des choix déroutants. Cela nous rappelle le texte d’Esaïe : « mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies, dit l’Eternel  » (55 : 8,9). Saisissons l’occasion pour dire que ces choix déroutants de Dieu devraient nous conduire à beaucoup de prudence lorsque les chrétiens parlent de tous ceux qui ne pensent pas comme eux, et que sont appelés familièrement les païens.

Mais que savons-nous de Naaman ? Nous avons déjà dit qu’il était le chef de l’armée syrienne. Mais de plus, le texte nous apprend qu’il  jouissait d’une grande considération auprès de son roi. C’était aussi un vaillant guerrier, mais il était lépreux. Or à cet endroit du récit, on apprend que parmi les captifs d’Israël, il y avait une petite fille appartenant à ce peuple, qui était au service de la femme de Naaman  (cf. 2 Rois 5 : 2). On ne connaît pas son nom, mais elle témoigne.

 

 Quelles sont les caractéristiques de son comportement :

- Elle est bienveillante pour ce couple, malgré sa déportation. Son état d’esprit est donc exceptionnel. Au lieu de cultiver des sentiments de haine ou de vengeance, elle veut le bien de Naaman, elle vit par anticipation la parole de Jésus : « aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent... » Matthieu 5 : 44 ; (ces paroles du Seigneur étaient déjà en germe dans les textes anciens, Exode 23 : 4,5).

- Elle donne un témoignage simple, sincère et convaincant.

Dieu aime ceux qui agissent avec un cœur d’enfant, cf. Matthieu 18 :3, (David aussi était tout jeune quand il a affirmé sa confiance en Dieu).

De ce fait le récit met en exergue un contraste :

Il acte un profond décalage entre le témoignage confiant de cette petite fille, et l’attitude suspicieuse du roi d’Israël ! (cf. 2 Rois 5 : 7).

Mais, heureusement  le prophète Elisée va intervenir pour calmer la situation et amener le roi à la raison.

Revenons un instant à l’attitude de Naaman, cf. 2 Rois 5 : 9-14). Personne ne peut nier qu’il soit bien intentionné. Certes, il est directement intéressé, il veut être guéri, mais il  fait le voyage dans le territoire des ennemis d’hier... Sa démarche n’était pas évidente à faire...

Certes, il veut bien être guéri par un étranger, mais pas n’importe comment ! Il s’attend à ce que son rang  soit respecté : n’est-il pas le chef suprême des armées qui ont vaincu le peuple d’Israël ! Il arrive donc en grande pompe, comme un conquérant sur son char, et il donne des ordres.

En d’autres termes, il veut bien bénéficier des bontés divines, mais en dictant ses règles. Il n’est pas prêt à s’humilier, en l’occurrence à descendre de son char, et à entreprendre une démarche personnelle pour rencontrer Elisée. Lui, le personnage de haut rang, lui le vainqueur ne doit pas s’abaisser devant le vaincu ! On l’entend presque dire : « je veux bien être guéri, mais pas à n’importe quel prix ! ». Son orgueil est sur le point de bloquer sa démarche d’espérance.

Ne pensez-vous pas que nous ressemblons souvent à Naaman. Nos prières pour une guérison ou pour toutes autres demandes importantes, sont souvent assorties de conditions avouées ou pas. Notre fierté place aussi ses exigences et ses limites...

Nous aussi, nous voulons bien être guéris, mais « pas question de descendre de notre char ». Nous voulons que Dieu nous réponde, mais comme nous l’avons prévu, sans intégrer sa volonté. Nous risquons d’être dans une demande  déconnectée de l’humilité, et comme Naaman, nous risquons d’être irrités quand les réponses ne correspondent pas à notre attente, quand apparemment Dieu reste sourd à notre détresse, (cf. Jacques 4 : 3).

 

Elisée, inspiré par Dieu a transmis à Naaman un message clair et facile d’exécution. Sa pédagogie s’est adaptée à ce personnage trop fier de son statut de chef : Elisée n’est pas sorti se présenter devant Naaman, peut-être parce que Naaman n’a pas voulu descendre de son char. La rencontre n’était pas mûre !

De plus, il attendait un miracle spectaculaire, devant tout le monde, et Elisée le renvoie à sa solitude, dans un face-à-face avec lui-même, vivre une démarche personnelle de foi. Cela paraît humiliant, mais c’était nécessaire...

Que renferme au juste le message du prophète Elisée ?

 

1) Va.

Il y a là, clairement énoncée, la nécessité d’une démarche personnelle. Il en va de même pour la guérison totale, appelée salut, de chacun d’entre nous. On ne peut pas être guéri par procuration. Depuis l’Eden, cet appel ne cesse d’être lancé à chaque individu de ce monde. Va, induit l’incontournable aventure personnelle dans la confiance en un Dieu qui accompagne, conduit, corrige et mène à bonne destination.

 

2) Lave-toi 7 fois dans le Jourdain : Les serviteurs vont très justement faire remarquer à Naaman que si le prophète avait demandé quelque chose de difficile, il l’aurait fait. Alors... pourquoi refuser la simplicité ! «  Fais ce qu’il t’a dit ».

Effectivement si la demande avait été difficile. (Rabbinat français)... extraordinaire. (T.O.B)... une grande parole. (Chouraqui), ne l’aurait-il pas faite ?

 

Le travers de l’humain est de rechercher le complexe au détriment du simple. Ce comportement traduit au second degré un besoin de faire, pour que cela soit valorisé. Donner du prix, du poids à nos actions pour qu’elles se présentent méritoires aux yeux de Dieu et des hommes, c’est encore une question d’orgueil ! Répétons-le, en amour il  n’y a pas de mérites, seulement du partage !

Nous n’avons aucun mérite à faire le bien. C’est Jésus qui disait à ses disciples : « Vous de même, quand vous avez fait tout ce qui vous a été ordonné, dites : Nous sommes des serviteurs inutiles, nous avons fait ce que nous devions faire. »  Luc 17 : 10 . Faire le bien devrait être un comportement normal !

 

3) Fais ce qu’il t’a dit : Tel est le conseil des serviteurs de Naaman.

Lave-toi 7 fois, et tu seras pur ! Baigne-toi 7 fois (Rabbinat Français et Chouraqui).

Ce message d’Elisée, tout à fait approprié à Naaman, nous interpelle tout autant. Il s’adresse à nous tous, qui vivons dans un monde de plus en plus complexe  en relation les uns avec les autres. Faire simple devient compliqué !

Or plus une démarche spirituelle est simple, plus elle sollicite notre foi, car elle dépossède l’humain de son orgueil, de ses réserves et de ses résistances.

 

De même que Naaman devait aller tout simplement se plonger 7 fois dans le Jourdain pour être pur de sa lèpre, de même il nous faut accepter d’aller à Jésus tel que nous sommes.  

Jésus a dit :

« venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés et je vous donnerai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de cœur ; et vous trouverez le repos pour vos âmes. Car mon joug est doux, et mon fardeau léger  »  Matthieu 11 : 28-30 .

C’est simple, léger et tonifiant, mais cela relève d’une capitulation sans condition.

Dans notre récit, Naaman descendit et se plongea 7 fois dans le Jourdain. Soulignons au passage que la notion d’être plongé dans l’eau était un signe de purification. Quand Jean, appelé le Baptiste, reprit ce rite, il ne fit que reprendre ce qui était déjà inscrit dans la mémoire collective du peuple d’Israël. (Cela dément ceux qui pensent que Jésus et ses disciples ont été influencés par un rite essénien. Cette symbolique n’était d’ailleurs pas propre qu’à Israël.  La symbolique d’un baptême d’eau était déjà comprise).

Pourquoi y avait-il cette obligation de se plonger 7 fois ?

Outre la symbolique du chiffre indiquant ce qui est parfait, complet, entier, il y a peut-être une autre raison.

Le miracle pour Naaman fut le résultat d’un acte de foi, simple, mais précis. Si Naaman avait pris la liberté de ne se plonger qu’une fois, rien ne se serait réalisé.

Ceci nous amène à comprendre qu’il nous faut accepter les conditions édictées par Dieu sans condition. Ce n’est pas parce que Dieu nous propose une démarche simple que nous pouvons faire ce que l’on veut ou en modifier l’énoncé à notre convenance ! Il existe malheureusement du prêt-à-porter spirituel, du bon marché spirituel…  

Nous devons obéir à Dieu, comme Christ a obéi à son père. D’ailleurs lui-même n’a-t-il pas dit : « Je vous donne un exemple afin que vous fassiez comme je vous ai fait » Jean 13 : 15  (voir encore Jean 15 : 10 -14).

Après avoir agi conformément à la parole du prophète, Naaman sortit de l’eau et le texte donne cette précision : « sa chair redevint comme la chair d’un jeune enfant et il fut pur. » (v.14).  La foi est la meilleure cure de jeunesse !

L’acte de foi, suivi d’une obéissance volontaire, heureuse et joyeuse vaut mieux que tous les produits antirides et antivieillissement !

 

Heureusement, Naaman avait des serviteurs intelligents. Leur réaction pleine de bon sens et d’à-propos a été salutaire pour leur maître.

« Mon père, si le prophète t’avait demandé quelque chose de difficile, ne l’aurais-tu pas fait ? Combien plus dois-tu faire ce qu’il t’a dit : lave-toi, et tu seras pur ! » (v. 13).

La sagesse n’est pas toujours là où on la croit. Sans l’intervention d’une toute jeune servante et maintenant de ses serviteurs, Naaman serait passé à côté de l’occasion de sa vie.     

Sachons donc à notre tour réfléchir, et accueillir les conseils de ces humbles serviteurs et servantes, que Dieu place sur notre chemin pour nous interpeller, et nous repositionner sur l’essentiel. Acceptons d’être visités par cette sagesse :

la relation avec Dieu doit être simple et profonde. La confiance en Dieu doit l’emporter à chaque détour de notre marche. Nous devons nous pénétrer de l’idée que Dieu veut notre bien et notre salut. C’est ce qui devrait faciliter notre capitulation sans condition. Dieu ne nous demande rien d’extraordinaire ! Même plus ! Il ne nous demande rien, qu’il ne nous donne par avance (cf. Ephésiens 2 : 10, 2 Thessaloniciens 5 : 23-24). Notre orgueil constitue le plus souvent, le plus grand obstacle à l’exaucement de nos prières.

 

Le récit se poursuit avec une conclusion intéressante : lire 2 Rois 5 : 15-19.  Cette dernière appelle plusieurs observations :

 1) Naaman retourne vers Elisée. Cette démarche est le propre de la conversion : un retour à Dieu. C’est le sens  du mot grec μετάνοια (métanoïa). Dans le Nouveau Testament, il est traduit par la repentance. (μετάνοια est un mot composé de :          Méta, μετα= au milieu, au cœur et de νοια (Noïa), //  νουσ, (nous)= intelligence, volonté. C’est une vraie transformation intérieure qui n’a rien toutefois de magique.

 2) Je reconnais : Naaman a fait une expérience personnelle, il est descendu de son char. Maintenant il peut rencontrer sans problème Elisée, maintenant la relation édifiante peut s’établir...

Assurément l’orgueil peut bloquer de prometteuses espérances.

Naaman a désormais de nouvelles priorités qui conduisent sa vie. Il peut à son tour témoigner de l’amour de Dieu pour lui. Il ne craint pas de le dire à haute voix devant ses serviteurs.

Quel témoignage ! Venant d’un Syrien, c’est puissant... Ce fait a traversé les siècles. Il a été cité par le Seigneur (cf. Luc 4 : 27), et nous arrive aujourd’hui.

 

 3) Naaman demande à Elisée d’accepter un présent. Quand le cœur est touché, on a envie de donner, de se donner. Mais la délivrance du message d’espérance doit rester gratuite. (cf. Matthieu 10 : 8)

 4)  Désormais Naaman n’adorera que Dieu seul  (v.17b).

La dernière requête de Naaman : 2 rois 5 : 18,19.

Il a un problème de conscience. Son roi adore le dieu de l’orage : Rimmôn. A chaque fois il doit l’accompagner dans les cérémonies. Or ce n’est plus son choix, mais peut-il agir autrement ? Alors que faire ?

Cette situation pose le problème de la complexité de notre engagement de foi dans certaines circonstances. La réponse du prophète est merveilleuse de sagesse : «  va en paix » ; parole empreinte d’intelligence spirituelle qui déculpabilise et renvoie à une pratique de vie intérieure. Dieu regarde au cœur et connaît toutes nos motivations quelles que soient les circonstances... Alors, nous aussi, allons en paix !

 

Conclusion :

 

Cette histoire nous apprend :

- Que Dieu regarde avant tout le cœur de l’homme, et non son appartenance à tel peuple ou religion.    

- Qu’il nous faut respecter les choix de Dieu, même et surtout, si on ne les comprend pas, en partie ou complètement. Une capitulation sans condition ouvre des perspectives insoupçonnées…

- Que Dieu a dans le monde, dit païen, des personnes qui l’honorent et le servent.

- Que Dieu choisit souvent le témoignage de gens simples.

- Que nous avons à être prudents certes, mais pas méfiants comme le roi d’Israël.   

- Qu’il nous faut saisir toutes les occasions pour rendre témoignage de notre foi.  

- Que notre orgueil, comme celui de Naaman, est souvent la cause de nos échecs dans notre bonne relation à Dieu.

- Que Dieu utilise parfois les réflexions et interpellations de notre voisinage pour nous faire progresser dans une relation de confiance envers Lui. 

- Que l’appel de Dieu à la guérison totale de l’être complet est clair. Il requiert une réponse simple : celle du cœur.

- Que nous avons à suivre ce que Dieu nous demande sans amender son exigence. L’amour porte au respect de la parole.

- Que le miracle de la conversion est la réponse de Dieu à notre engagement de foi et d’amour.

- Que Dieu, l’auteur de notre vie, doit rester notre priorité absolue. Lui seul est digne de notre adoration.

- Que dans des situations complexes qui paraissent être des compromis, Dieu sait lire dans notre cœur. Dieu nous invite à assumer un choix libre, sans craindre le regard des autres. Il nous invite à agir au mieux, compte tenu des contraintes et des circonstances. Lui seul connaît les motivations de nos choix. Dieu intègre notre droit à l’erreur et nous fournit souvent la possibilité de rectifier nos positions, loin de tout sentiment de culpabilité.

- Que sa parole d’amour est toujours d’actualité : une capitulation sans condition nous ouvre un nouvel espace. Elisée l’a énoncé à Naaman : va en paix ! Allons en paix !

 

 

                                                                              Eychenne Jacques

                                                                                 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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