Les trois épreuves redoutables

 

     Les trois épreuves            redoutables

                                ou

 La tentation de Jésus-Christ

       Matthieu 4 : 1-11

 

Introduction :

 

Après avoir été baptisé dans le Jourdain par Jean, Jésus fut inspiré de se diriger vers le désert afin d’affronter celui qui est, bibliquement, à l’origine de notre désordre individuel et planétaire. L’engagement solennel du Seigneur par le baptême par immersion n’avait de sens que dans l’optique d’un combat spirituel avec celui qui avait usurpé l’autorité divine et honteusement menti pour asseoir son autorité. Les dictateurs modernes ne font que reproduire le même processus de provocation initié par le diable.

En introduction de son ministère, après avoir été baptisé, on apprend que le personnage Jésus est investi d’une mission divine. Une voix venant du ciel le déclare : fils bien-aimé de Dieu ou l’élu de Dieu (cf. Matthieu 4 :12 ; Marc 3 : 11 ; Luc 3 : 22 ; Jean 1 : 34). Pour que la venue du Christ sur notre planète soit claire, il se dirige vers un endroit désert afin d’identifier et de combattre l’auteur de tous les dérèglements de notre monde.

L’enjeu étant ainsi posé, le tentateur va pouvoir exercer le pouvoir dans lequel il excelle. Examinons sa tactique, étudions les textes.

 

Développement :

 

  1. « Alors Jésus fut emmené au désert par l'Esprit, pour être tenté par le diable. Il jeûna durant quarante jours et quarante nuits, après quoi il eut faim. Et, s'approchant, le tentateur lui dit : " Si tu es Fils de Dieu, dis que ces pierres deviennent des pains. " Mais il répondit : " Il est écrit : Ce n'est pas de pain seul que vivra l'homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu " Matthieu 4 : 1-4, version FBJ.

 

La première difficulté à laquelle Jésus dut faire face est la faim. Ce contexte n’est pas surprenant. Il a pour objet de nous replonger à l’origine de la chute de nos premiers parents. C’est sur le thème du manger que le diable posa ses insidieuses questions (cf. Genèse 3 : 1-6).

Notons que la question du tentateur avait pour objectif d’instiller le doute. Jadis, il avait procédé de la sorte pour déstabiliser Eve. Symboliquement la nourriture étant une condition de vie, il devenait limpide que le tentateur voulait s’approprier un pouvoir qui n’appartenait qu’à Dieu.

De même avec le Christ, le but avoué du diable était de le faire déchoir de son statut de Fils de Dieu et d’attenter à sa mission de restauration d’une humanité vaincue. Cette situation nous apprend que l’épreuve la plus douloureuse que nous pouvons subir va aussi toucher ce à quoi nous tenons le plus.

Le Seigneur aurait pu répondre en engageant sa propre parole. Elle aurait été suffisante car elle faisait autorité. Mais il désira nous montrer le chemin par lequel nous pouvons vaincre l’adversité. Il cita un texte des rouleaux des prophètes inspirés par son Père (cf. Deutéronome 8 : 3). Le diable ayant contesté une parole divine, Jésus fit référence à une autre parole divinement inspirée. Cette démarche nous invite à beaucoup d’humilité. Au lieu de faire face à l’adversité en utilisant nos propres arguments, apprenons à utiliser un chemin sécurisé. Celui qui a fait ses preuves au cours de l’histoire humaine et personnelle, c’est le Livre inspiré (τὸ βιβλίον = to biblion= le livre), la Bible. Cette autorité indépendante de nos fragilités est un rempart contre l’adversité. Elle nous enseigne à prendre conscience que la nourriture spirituelle est aussi essentielle à notre équilibre que le pain l’est pour notre corps.

 

  1. « Alors le diable le prend avec lui dans la Ville Sainte, et il le plaça sur le pinacle du Temple et lui dit : " Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et sur leurs mains ils te porteront, de peur que tu ne heurtes du pied quelque pierre » Matthieu 4 : 5-6, version FBJ.

 

Comme on le constate l’adversaire du Christ a très vite compris l’argumentation de sa défense. Voulant la renverser, il utilise à son tour un texte des prophètes (cf. Psaume 91 : 11-12). Que nous apprend cette deuxième mise à l’épreuve sur la capacité de résilience du Seigneur ?

Citer les Saintes Ecritures, sans en respecter le contexte, révèle une attitude suspecte. En l’occurrence on voit bien que le diable connaissait parfaitement les textes des rouleaux des prophètes. Le fait qu’il cite une vérité n’a pas pour autant blanchi l’état d’esprit de ses motivations.

Il peut en être de même dans nos partages d’expérience avec des personnes qui connaissent par chœur les textes sacrés. Les citer n’a rien de magique, surtout si nos pensées ne sont pas en adéquation avec l’esprit qui les a initiés. A ce sujet, l’apôtre Paul dira à son disciple Timothée : « il faut éviter les querelles de mots, bonnes seulement à perdre ceux qui les écoutent » 2 Timothée 2 : 14, version FBJ. Un bon outil ne garantit jamais une bonne utilisation. On peut même être meurtrier en utilisant un bon outil !

Notons au passage que la démarche de fond du diable est restée invariable. Elle avait pour suprême objectif de discréditer le fait que le Christ soit le Fils de Dieu. De plus, la référence à une protection des anges nous rappelle le dialogue du diable avec Dieu concernant son serviteur Job. Son argument était le suivant : retire à Job ta bénédiction, et tu verras s’il ne te maudit pas en face (cf. Job 1 :11). Cela dit, dans notre texte, le diable ne demande pas à Jésus de se suicider en se jetant du haut du pinacle du temple. Il veut le forcer à démontrer qu’il est venu avec une forme humaine, tout en ayant garder sa divinité, donc son immortalité. Non seulement il veut contester sa filiation avec Dieu le Père, mais en plus, il insinue un combat déloyal en sachant qu’il bénéficie d’un statut privilégié.

Ce texte impact nos quotidiens. Souvent nous pensons que notre amour pour Dieu nous garantit une assurance tous risques. Notre fidélité à Dieu ne peut pas nous dispenser des épreuves. Dieu ne tient pas une comptabilité de notre foi pour nous épargner les difficultés.

Chaque jour des croyants sincères sont frappés par le cancer, les virus, les bombes, et bien d’autres malheurs. On a trop souvent utilisé l’aspect « markéting » de la foi pour faire entrer des gens dans l’église. La foi n’évacue pas le combat spirituel, elle le ravive. L’apôtre Paul, qui est défini comme le combattant spirituel par excellence, n’a pas été épargné par des atteintes violentes à son intégrité physique (cf. 2 Corinthiens 11 : 21-30). Il a, à l’instar du Christ, combattu le bon combat en faisant confiance au Tout-Puissant dans toutes les circonstances.

La provocation subtile du diable est une réclamation formelle à produire une preuve de l’amour du Père pour son Fils. Mais, grossière erreur, l’amour ne se prouve pas, il s’éprouve. La confiance entre deux êtres ne se dicte pas, elle s’impose naturellement ou elle n’est pas, tout simplement. Cette théologie des preuves pour croire révèle une faille et il faut la dénoncer. Elle mène à un calcul insidieux qui tend à mettre en place le processus suivant : « j’ai foi en Dieu, si je comprends tout, suis béni, et que rien de mauvais ne m’arrive ».

Cette deuxième tentative de séduction avait pour objectif de perturber la confiance du Fils en son Père. Le sens caché de cette épreuve nous apprend que nous serons toujours placés devant le même dilemme de la foi en celui qui nous a donné vie.

En regard de ce second niveau de lecture, il est facile d’attirer notre attention sur les dérives d’une telle théologie qui est centrée sur le destin de la preuve. Beaucoup sont conditionnés par les preuves de l’existence de Dieu et son action réelle dans notre monde. Cette spiritualité à le relent politique du « donnant-donnant ». Dans le prolongement de cette réflexion, on peut distinguer toutes les tentatives humaines d’une économie du salut à meilleur prix. Cette politique spirituelle du mérite a pollué des générations de croyants qui se sont sacrifiés pour plaire à Dieu (il faut bien mériter le ciel !). Les pères de l’Eglise ont une littérature abondante relatant ces déviances. Elles ont conduit parfois à un marchandage des grâces divines.

Nous pourrions nous étendre longuement sur le sujet, mais il me semble plus constructif de prôner le rôle incontournable de la foi qui se vit dans la confiance sereine. L’expérience de l’apôtre Paul est salutaire à ce sujet. S’adressant aux chrétiens d’Ephèse il écrira : « C’est par grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu » Ephésiens 2 : 8, version LSG.

Pour appuyer cette vérité fondamentale, l’apôtre avait déjà donné son témoignage. S’adressant aux Corinthiens, il n’hésita pas à révéler son problème personnel : « Et pour que l'excellence même de ces révélations ne m'enorgueillisse pas, il m'a été mis une écharde en la chair, un ange de Satan chargé de me souffleter - pour que je ne m'enorgueillisse pas ! À ce sujet, par trois fois, j'ai prié le Seigneur pour qu'il s'éloigne de moi. Mais il m'a déclaré : " Ma grâce te suffit : car la puissance se déploie dans la faiblesse. " C'est donc de grand cœur que je me glorifierai surtout de mes faiblesses, afin que repose sur moi la puissance du Christ » 2 Corinthiens 12 : 7-9, version FBJ. 

Tout le parcours du Christ en terre de Palestine nous dit qu’il n’avait rien à nous prouver mais qu’il avait tout à nous donner par amour.  C’est la caractéristique de l’amour d’essence divine. Le pléonasme utilisé par l’apôtre Paul est signifiant à ce sujet. Il parlera du don gratuit de Dieu : « Le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus, notre Seigneur » Romains 6 : 23b, version FBJ.

Jésus va répondre à cette deuxième provocation perfide en citant de nouveau le texte du Deutéronome 6 : 16 : « tu ne tenteras point le Seigneur ton Dieu ». Le pouvoir du tentateur est démasqué. Le mal est opposé au mal en le mettant en difficulté. En médecine c’est le principe ancien du vaccin pour rendre inactif le virus agressif.

Cette réplique nous invite à entrer en résistance contre toute agression tendant à porter atteinte à l’amour inconditionnel de Dieu et à édulcorer le message d’un amour gratuit. Il nous faut résister au réflexe humain de donner des preuves, là où tout est don. Il faut arrêter de faire « mousser » nos mérites pour gagner le ciel. Dieu ne nous demande rien que nous ne puissions donner. Si l’amour attend une réciprocité, si comme le dit Paul, l’amour est pure grâce. Ainsi, il nous faut admettre que nos désirs de production de preuves pour bénéficier de son amour sont vaines. Ne pas tenter Dieu, comme le dit si bien le Christ, c’est aussi mettre un terme à tous nos marchandages et chantages affectifs pour justifier la réception de l’amour divin (agapè). Les religions ont été très productives sur le sujet. Elles ont souvent placé les humains sur des fausses pistes.

 

  1.  « De nouveau le diable le prend avec lui sur une très haute montagne, lui montre tous les royaumes du monde avec leur gloire et lui dit : " Tout cela, je te le donnerai, si, te prosternant, tu me rends hommage. " Alors Jésus lui dit : " Retire-toi, Satan ! Car il est écrit : C'est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, et à Lui seul tu rendras un culte. " Alors le diable le quitte. Et voici que des anges s'approchèrent, et ils le servaient » Matthieu 4 : 8-11, FBJ.

 

La troisième tentative d’estocade porte sur la question du pouvoir. Qui le détient sinon celui à qui on est soumis ! Déjà cette contestation avait été portée dans le ciel par le diable. Un conflit ouvert s’était manifesté avec des conséquences fâcheuses (cf. Apocalypse 12 : 7-18). Ne pouvant avoir gain de cause, c’est maintenant sur la terre, que se poursuit ce combat séculaire.

Le diable revendique le pouvoir absolu en son propre nom, afin d’assujettir toutes les créatures humaines. Cette démarche a fait des émules. Nous pouvons continuer à acter ce fait dans les actualités de notre monde. La jouissance du pouvoir doit provoquer une grandiose excitation qu’un être équilibré et bienveillant ne peut concevoir. C’est la raison pour laquelle nous disons que la solution définitive ne peut appartenir qu’à Dieu. Lui seul peut rétablir l’ordre et l’harmonie. C’est précisément ce que le Christ est venu nous annoncer en remportant la victoire sur le diable.

Pour l’heure, Jésus, fidèle à sa démarche, va lui répondre en citant Deutéronome 6 : 13. La même vérité est mentionnée plusieurs fois dans l’Ancien Testament. En particulier dans Exode 20 : 3.

Symboliquement, le Seigneur fait référence au Père. C’est lui qui détient, par acte créateur, mû par l’amour, le pouvoir suprême de décision (cf. Romains 2 : 16). C’est à Lui que nous devons rendre un culte, c’est-à-dire construire une relation spirituelle simple, authentique et profonde. Le texte précise : « à Lui seul tu rendras un culte » v.10. (cf. αὐτῷ μόνῳ = auto monau = à lui seul. En grec la méprise n’est pas possible. Dieu seul doit être adoré). La preuve par neuf est relayée par les anges qui reconnaissent en Christ celui qui ne fait qu’un avec son Père (cf. Jean 10 : 30).

 

Cette victoire sur le mal a ouvert une voie nouvelle pour tous les habitants de notre planète. A la fois, elle nous révèle que nous sommes aimés de Dieu, mais encore elle nous indique que nous pouvons vaincre l’adversité en expérimentant deux démarches :

  • La première nous fait prendre conscience que la victoire a déjà été remportée par le Christ.
  • La deuxième que nous pouvons résister en nous retranchant derrière ses promesses fortes. Par Lui, avec Lui, en Lui, nous pouvons être, à notre tour, victorieux. Notre Seigneur a déclaré : « Je vous ai dit ces choses, pour que vous ayez la paix en moi. Dans le monde vous aurez à souffrir. Mais gardez courage ! J'ai vaincu le monde. " Jean. 16 :33, version FBJ.

Nous devons faire nôtre la formule que l’apôtre Paul a adressée aux chrétiens de Rome : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, sois vainqueur du mal par le bien » Romains 12 :21, version FBJ.

 

Conclusions :

 

Nous sommes entrés plus que jamais dans une période de résistance. Tous les indicateurs de menace dans notre monde sont au vert. Les fils du diable, grisés par des bouffées despotiques veulent mettre à mal la liberté de paroles, de conscience et de culte. Tout est prétexte pour imposer par la force tout ce qui est contraire à la dignité et au respect de la personne humaine. « Ne devenez pas esclaves des hommes » dira l’apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe (cf. 1 Corinthiens 7 : 23b).

Si le Christ a été éprouvé en toutes choses, sans être vaincu, sachons que nous pouvons compter sur Lui pour être secourus dans nos besoins (cf. Hébreux 4 : 15-16). Par la foi, nous avons cette assurance qu’il nous vient en aide (cf. Hébreux 2 : 16).

« Car du fait qu'il a lui-même souffert par l'épreuve, il est capable de venir en aide à ceux qui sont éprouvés » Hébreux 2 : 18, version FBJ.

 

Mais ayons la précaution de dissocier les attaques de l’ennemi de la foi en Dieu. Beaucoup s’interroge sur le fait qu’ils sont injustement éprouvés et pour certains persécutés. Le fait que nous soyons attaqués n’implique pas Dieu pour au moins deux bonnes raisons :

  • D’une part Dieu n’éprouve ou ne tente personne (cf. Jacques 1 : 13).
  • D’autre part, son amour pour nous ne peut être remis en question : « Dieu ne permettra pas que vous soyez éprouvés au-delà de ce que vous pouvez supporter, mais au moment où surviendra l’épreuve, il vous donnera la force de la supporter, et ainsi, le moyen d’en sortir » 1 Corinthiens 10 : 13, traduction libre.

 Ainsi le fait d’être éprouvés n’indique pas que nous manquons de foi. Nous n’avons rien à prouver, mais simplement à accueillir les paroles du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

Soyons résilients et luttons contre toute atteinte à la liberté de penser et d’aimer.

 

« Mais dans toutes ces choses nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés » Romains 8 : 37, version LSG.

 

« Tout homme ou institution qui essaiera de me voler ma dignité perdra » Nelson Mandela, homme d’état, président (918-2013).

 

« Dès que quelqu’un comprend qu’il est contraire à sa dignité d’homme d’obéir à des lois injustes, aucune tyrannie ne peut l’asservir » Gandhi, homme politique, philosophe, révolutionnaire (1869-1948).

 

« Quand il s’agit de dignité humaine, nous ne pouvons pas faire de compromis » Angela Merkel, ex-chancelière de l’Allemagne.

                                                                                           Jacques Eychenne

 

 

PS : FBJ, version Française de la Bible de Jérusalem. LSG, version Louis Segond.

 

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