Les noms de Dieu

 

 

   Les noms de Dieu

               ou

du pluriel dans le singulier

        Jérémie 10 : 6

 

Introduction :

 

Quand nous prononçons le nom d’une personne, nous savons que nous identifions précisément un être vivant. Mais qu’en est-il quand nous prononçons le nom de Dieu ? A première vue, le caractère générique de ce nom peut être dérangeant, s’il ne correspond pas à une identification précise. Cette difficulté ressentie par l’humain a donné naissance à diverses appellations de la divinité transcendante. Les écrivains de la Bible ont perçu la grandeur de Dieu au travers d’expériences qui les ont amenés à définir une seule facette de sa personnalité. Comment l’humain fini et limité a-t-il perçu l’infini et l’illimité de la Toute-Puissance divine ? Le nom de Dieu, n’est-ce pas Dieu lui-même ? C’est ce cheminement que nous allons emprunter, afin de bien saisir la progression de la révélation d’un Dieu transcendant à celui d’un Père proche et attentionné pour chacun.

 

Développement :

 

« Nul n'est comme toi, Yahvé, tu es grand, ton Nom est grand dans sa puissance »  Jérémie 10 : 6, version de Jérusalem. La première mention du nom de Dieu se trouve au premier chapitre de la Genèse : « Au commencement Dieu créa les cieux et la terre » Genèse 1 : 1.  Dieu se révèle là comme un être pluriel : Elohim. Il ne décline pas son identité. Il se laisse découvrir dans ses actes créateurs. Peut-être que pédagogiquement, Moïse, à qui l’on attribue la rédaction du Pentateuque, sous l’inspiration divine, a voulu faire cheminer les humains d’une compréhension ancestrales et multiples, à une unicité de la personne divine (cf. Moïse a grandi en Egypte entouré de dieux. La dévotion aux dieux était quotidienne. Par exemple, le matin, le soleil naissant prend la forme du scarabée Khépri ; puis le midi, au zénith, il prend la forme du puissant dieu Rê-Horakhty ; ensuite le soir, vieillissant, il prend la forme du dieu Atoum, un vieillard à tête de bélier.). Elle est bien là l’originalité de la révélation de ce Dieu.  Ainsi pourrait se comprendre ce pluriel  attesté par la suite en Genèse 1 : 26. Chez les hébreux, le nom est toujours signifiant de celui qui est désigné. Dans de nombreux passages le nom de Dieu est pris pour la personne même de Dieu (cf. Exode 23 : 21 ; Deutéronome 12 : 5, 11, 21 ; 16 : 2,6…). Le temple de Jérusalem est une demeure bâtie à son nom (cf. 2 Rois 8 : 13,18-20). Si David a eu cette idée de construire un temple à Dieu, et si c’est Salomon qui a exécuté le projet, c’est aussi pour montrer aux autres peuples que leur Dieu était unique. La multiplicité des temples païens devait être concurrencée par l’unicité du temple de Jérusalem. L’Eternel avait dit : « C’est dans Jérusalem que je placerai mon nom » 2 Rois 21 : 4.

La Bible ne présente pas Dieu sous l’angle philosophique, mais au travers de circonstances concrètes. Elles nous rapportent les multiples aspects de sa personnalité. Toutefois, il est impossible de cerner la personne de Dieu par un seul mot. Quand Moïse fut mandaté par Dieu pour aller avec les enfants d’Israël, il  posa clairement la question : « s'ils me disent : quel est son nom ? Que leur dirai-je ? ». Dieu dit à Moïse: « Je suis qui je serai ». Il dit : « Tu parleras ainsi aux fils d'Israël : Je suis m'a envoyé vers vous.»  Exode 3 : 13-14, version TOB. D’autres versions traduisent plus fréquemment : « Je suis celui qui suis » Version Darby, Segond, NEG, ou « Je suis celui qui est », version de Jérusalem, ou encore « Je suis qui je suis », version Bible en français courant. Cette expression énigmatique a ouvert la voie a plusieurs interprétations. Dans le contexte immédiat, Dieu dit à Moïse : «  JE SUIS avec toi » Exode 3 : 12. Cette précision éclaire, me semble-t-il, le sens du « JE SUIS ». Remarquons toutefois que notre difficulté à cerner la personne de Dieu est révélatrice de nos limites, même si nous comprenons que Dieu se définisse comme un éternel présent, qui existe par lui-même, et en lui-même, en donnant vie à l’univers. Certains commentateurs ont ressenti la nécessité de préciser : « Je suis celui qui est et qui sera » pour bien exprimer le concept d’éternité. Ce Dieu premier, « ce Dieu de vos pères » (cf. Exode 3 : 6)  a inspiré dès les origines un grand respect, d’où l’attribut de saint (cf. Lévitique 19 : 2 ; 1 Samuel 6 : 20). Même dans le ciel, les autres êtres créés le révèrent ainsi (cf. Esaïe 6 : 3 ; Apocalypse 4 : 8).  

Devant une telle prodigieuse transcendance, on comprend pourquoi les humains ont eu de la difficulté à appréhender ce Dieu de la Bible. La globalité de son être est toujours restée inaccessible. En actant ce fait, il devenait logique qu’aucun mot ne pouvait, à lui seul, le définir. Les massorètes, (copistes des rouleaux des prophètes) qui ont procédé à la retransmission des textes hébreux, ont ressenti très fortement cet embarras. Le tétragramme sacré YHWH était incommunicable. Il était d’ailleurs interdit d’essayer de le prononcer. Il était propre à Dieu seul. L’hébreu ne comportant pas de voyelle, les massorètes ont éprouvé le besoin d’en rajouter (mais lesquelles ? en français on aurait interchangé les a, e, i, o, u) tout en indiquant qu’il valait mieux utiliser le terme d’Adonaï  (qui signifie Seigneur, cf. Genèse 2 : 2, 5, 7-9, 15-55. Intuitivement, Jésus-Christ sera appelé de même dans les évangiles cf. Matthieu 7 : 21-22 ; 8 : 2, 6, 8, 9 : 28 etc.) par respect, afin de ne pas dénaturer le nom de Dieu.  A chaque fois qu’un massorète  écrivait le tétragramme, il fallait qu’il se purifie et utilise un moyen d’écriture uniquement réservé à cet effet. La moindre rature rendait le document impropre et il fallait le détruire. La combinaison des lettres - YHWH - avec des voyelles (conventionnellement choisies) a donné le mot de Jéhovah. Ce mot n’est qu’une construction humaine, car le vrai nom de Dieu  reste inconnu, a fortiori   intraduisible

Cela nous permet de comprendre pourquoi les humains ont rajouté au générique Dieu (cf. El en hébreu, Al en arabe) des attributs circonstanciés :

 

Résumons notre propos par les utilisations simples et composées du nom de Dieu :

  1.  Utilisation sous la forme première :

En français : Dieu, équivalents hébraïques : El, Elah, ou Elohim (pluriel) Genèse 1 : 1

             Eternel        -                 -          : YHWH (Yahvé)            Exode 3

             Seigneur      -                 -          : Adon ou Adonaï          Genèse 15 : 2

  1.  Utilisation forme  composée avec El = Dieu     :

Dieu Tout-Puissant--: El-SchaddaïGenèse 17 : 1 ; 28 : 3

Dieu Très-Haut: El-ElyonGenèse 14 : 18-22

Dieu d’éternité: El-OlamGenèse 21 : 33

Dieu Puissant: El-GobborEsaïe  9 : 5-6

Dieu d’Abraham, d’Isaac: El-Abraham, IsaacGenèse24 :12 ; 46 : 1

 Dieu de l’alliance: El-BeritJuges 8 : 33

Dieu de Béthel: El-BéthelGenèse 37 : 7

Dieu qui voit ou apparaît: El-RoïGenèse 16 : 13

  

  1. Utilisation forme composée avec YHWH (Yahvé)

Eternel Dieu: YHWH ElohimGenèse 2 : 5 ; Esaïe 34 : 6

Seigneur Eternel: Adonaï YHWHGenèse 15 : 2

Eternel des armées: YHWH Sabaoth1 Samuel 1 : 3

Dieu de vérité et de l’amen: YHWH AdonaïEsaïe 65 : 16

(Cette classification simplifiée ne peut rendre compte de toutes les subtilités de l’emploi du nom de Dieu… Cette liste est loin d’être exhaustive…).

 

Pourquoi prononcer le nom de Dieu a-t-il été autant difficile ?

 

Si la personne de Dieu demeure inaccessible à l’humain dans sa forme absolue, n’est-ce pas évident que son nom devait l’être tout autant ? Dieu s’est laissé trouver au travers des circonstances, d’où la variété des noms exprimant une pluralité d’expériences avec ce Dieu pluriel et un à la fois.

Quand Moïse demanda indirectement à voir Dieu, voici la réponse qui lui fût donnée : « Je ferai passer devant toi toute ma beauté et je prononcerai devant toi le nom de Yahvé. Je fais grâce à qui je fais grâce et j'ai pitié de qui j'ai pitié. Mais, dit-il, tu ne peux pas voir ma face, car l'homme ne peut me voir et vivre ». Exode 33 : 19-20, version Bible de Jérusalem. La réponse est claire. L’apôtre Jean confirmera le fait, en citant le témoignage de Jean-Baptiste : « Personne n’a jamais vu Dieu » Jean 1 : 18. Dès lors, comment admettre qu’un seul nom puisse identifier totalement Dieu ?

Sur ceux qui recherchaient Dieu et priaient dans ce sens, le nom de Dieu était invoqué, certainement avec le vocable d’Adonaï (cf. 2 Chroniques 7 : 14), mais ce nom mentionné dans le contexte est : YHWH יהוה=

Ce nom intraduisible devait faire référence à la relation que Dieu lui-même avait instillée avec ses sujets, dès leur création. « L’Eternel Dieu (litt. Elohim YHWH =    יְהוָ֙ה אֱלֹהִ֜ים) forma l’homme de la poussière de la terre » Genèse 2 : 7. C’est la raison pour laquelle le prophète Esaïe dira : «  voici, le nom de l’Eternel  (YHWH) vient de loin » Esaïe 30 :27. Pour bien montrer que la compréhension du nom de Dieu était lié à une expérience relationnelle, l’apôtre Paul précisera : « De même que, pour être postérité d'Abraham, tous ne sont pas ses enfants ; mais c'est par Isaac qu'une descendance portera ton nom »  Romains 9 : 7, version FBJ.

Pour nous le nom intraduisible de Dieu doit être respecté, car il fait référence à une vraie et authentique relation spirituelle: « Vous me chercherez, et vous me trouverez, si vous me cherchez de tout votre cœur »  Jérémie 29 : 13, version LSG.

Ainsi, si le nom de Dieu est inaccessible, tout comme l’est la personne plurielle de Dieu, cela requiert dans notre démarche beaucoup d’humilité…  

Dès lors, comment construire une bienfaisante relation spirituelle avec ce Dieu ?

« Nul n'a jamais vu Dieu ; le Fils unique, qui est tourné vers le sein du Père, lui, l'a fait connaître » Jean 1 : 18, version FBJ. (Litt. « Le Fils unique qui est Dieu dans le sein du Père l’a présenté Θεὸν οὐδεὶς ἑώρακεν πώποτε· μονογενὴς θεὸς ὁ ὢν εἰς τὸν κόλπον τοῦ πατρὸς ἐκεῖνος ἐξηγήσατο. κόλπος = sein, poitrine Luc 6 : 38 ; 16 : 23.  ἐξηγέομαι = expliquer, présenter, raconter Luc 24 :35 ; Actes 21 : 19. Ce verbe a donné naissance au mot exégèse. Il induit une explication, un développement). La clarté de ce passage nous parle de l’intimité du Père et du Fils, les deux étant appelés Dieu. C’est cette intimité que le Christ veut reproduire avec chacun de nous…

La voilà la grande révélation ! Le chemin de foi du croyant suit le parcours d’un Dieu tout-Puissant divers et multiple vers un Dieu unique, présent par amour au cœur des siens ( comme un Père l’est au sein de sa famille). Le ciel a visité la terre ! (cf. Luc 1 : 68 ; 7 : 16). On passe d’un Dieu qui délivre et libère (cf. Exode  20 : 2 ; Psaume 41 : 2 ; 22 :9)  à celui qui sauve. Jésus-Christ = en grec Ιησοῦς-Χριστός. Ce nom composé associe le nom de Ιησοῦς de Iecha, contraction de Iehochua traduit par Josué dans l’Ancien Testament, et Jésus dans le nouveau avec le sens de sauveur (cf. Actes 28 :28 ; 1 Thessaloniciens 5 : 9) à celui de Χριστός qui signifie l’oint de Dieu, le Messie (cf. Actes 9 : 22).

Désormais le nom de Dieu est identifié  à celui de Père : Notre Père ! Le Seigneur nous a recommandé d’appeler Dieu ainsi et pas autrement (cf. Matthieu 6 : 9). Tout au long de son ministère, Jésus nous a parlé de ce Père  (πάτερ). Matthieu mentionne plus de 45 fois ce mot. Il  veut souligner le lien de proximité qui traduit l’intention de ce Père. Ce lien appelle une réciprocité affective qui doit être nôtre. Le Christ, dans son humanité a illustré cette réalité en appelant Dieu, son Père : ἀββά. (ἀββά = mot araméen qui décrit tout spécialement l’intimité. Aujourd’hui, ce mot serait rendu par : papa). L’apôtre Paul a saisi cette compréhension, quand il nous dit : « vous n'avez pas reçu un esprit qui vous rende esclaves et vous ramène à la peur, mais un Esprit qui fait de vous des fils adoptifs et par lequel nous crions : Abba, Père » Romains 8 : 15, version TOB. « La preuve que vous êtes des fils, c'est que Dieu a envoyé dans nos cœurs l'Esprit de son Fils qui crie : Abba, Père ! »  Galates 4 : 6, version de Jérusalem).

La révélation d’un Père, dévoilée par Jésus-Christ, nous repositionne dans un nouveau rapport de relation. L’apôtre Paul l’a bien exprimé. Aujourd’hui, nous pouvons nous reconnaître comme les fils adoptifs de Dieu. Or, dans la Bible les enfants doivent avoir pour habitude d’honorer leurs parents. Marie, la mère de l’enfant Jésus, s’exclamera à sa naissance : « parce que le Tout Puissant a fait pour moi de grandes choses : saint est son Nom »  Luc 1 : 49, version TOB.

 

Conclusion :

 

Moïse en écrivant le Pentateuque sous l’inspiration divine nous a initiés à la compréhension d’un Dieu unique et pluriel à la fois. Cette révélation était révolutionnaire (et elle demeure pérenne), car tous les pays environnants avec adoptés une multiplicité de Dieu. Il y aura bien la tentative, en Egypte, d’Aménophis IV (ou Akhénaton). Il essaiera d’imposer la croyance en un dieu unique (Aton=disque solaire), mais sa tentative ne sera pas suivie par les prêtres et le peuple, très attachés aux autres dieux.

La caractéristique du Dieu de la Bible est d’avoir exprimé une relation de proximité avec son peuple (cf. Exode 25 :8 ; 29 :45). Son nom énigmatique était une invitation à le découvrir personnellement. La révélation divine étant progressive, ce Dieu unique, pluriel et majestueux, s’est invité parmi nous. Emmanuel (qui signifie Dieu avec nous) est le nom vers lequel se sont concentrées toutes nos espérances. Ainsi s’est réalisée la prophétie d’Esaïe : « le Seigneur, lui, vous donnera un signe : Voici, la vierge concevra et elle enfantera un fils, et appellera son nom Emmanuel » Esaïe 7 : 14, version Darby. Le Christ n’a pas porté ce nom, peut-être parce qu’il révélait le caractère profond de Dieu : « Dieu avec nous » Matthieu 1 : 23. Le fait que le Christ revête complétement notre humanité l’a conduit à nous proposer un autre nom, plus familier, celui de Père.

Les attributs ineffables de ce Dieu unique et pluriel ont été convertis en une appellation plus proche, plus accessible et plus familière : notre Père.

Désormais, point n’est besoin de chercher à déchiffrer le nom de Dieu. Le dévoilement de sa personne, à travers le Christ, nous en dit suffisamment pour déclencher en nous des attitudes d’amour et de reconnaissance. Maintenant que le Seigneur Jésus-Christ nous a fait découvrir l’étendue de son amour pour nous, chacun peut s’interroger sur la suite à donner à sa proposition. La foi est très simplement l’adhésion au projet bienveillant d’un Père.

« Ainsi, en ce jour-là, vous ne m'interrogerez plus sur rien. En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous demandez quelque chose à mon Père en mon nom, il vous le donnera »  Jean 16 : 23, version TOB.

Témoignage de l’apôtre Paul : « C'est pourquoi je fléchis les genoux devant le Père, de qui toute famille tient son nom, au ciel et sur la terre; qu'il daigne, selon la richesse de sa gloire, vous armer de puissance, par son Esprit, pour que se fortifie en vous l'homme intérieur, qu'il fasse habiter le Christ en vos coeurs par la foi; enracinés et fondés dans l'amour » Ephésiens 3 : 14-17, version TOB.

                                                                                 

                                                                                      Jacques Eychenne

 

 

 

 

 

 

 

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