La prière du "Notre Père" 3ème partie

La prière de référence

Matthieu 6 : 9-13 ; Luc11 2-4

3ème partie

 

 

Introduction :

 

 Nous avons, la fois dernière, pris connaissance des deux recommandations importantes qui précèdent l’énoncé du « Notre Père ». Ces mises en garde du Seigneur campent l’atmosphère qui devrait être notre dans notre relation avec Dieu. Le Christ sollicite une relation intimiste, dans laquelle le nombre de paroles importe moins que leur qualité. Etre tout simplement vrai, avec nos mots et nos émotions, est primordial. De plus, Dieu connaît parfaitement nos besoins. La prière nous renvoie donc à l’analyse de nos manques, de nos motivations, et de nos vrais besoins. Nous avons vu que dans cette quête, nous sommes soutenus et relayés par l’Esprit Saint. Cependant Dieu ne se substituera jamais à la formulation d’une expression personnelle… Le « Notre Père » est donc plus une prière dont il convient de s’inspirer, qu’un texte à réciter machinalement. Comme le disait le pasteur Louis Pernot : «  Répéter mécaniquement un texte, fût-il le plus beau, n’est pas prier ».

 

Ensuite, nous avons examiné la richesse du nom de ce Père que nous appelons ainsi. En particulier, nous avons pris conscience que Dieu, notre Père est avant tout Amour. C’est dire que nous faisons partie d’une authentique histoire d’Amour. Oui ! Nous avons été désirés ! En tant que tels, nous avons droit à un héritage dont on mesure mal encore la portée. Redisons-le avec force avant de poursuivre : La prière du « Notre Père » est le lieu privilégié de l’apprentissage de notre relation personnelle avec le Tout-Puissant. Si Notre Père est aux cieux, c’est bien parce que les cieux nous disent qui est Dieu. Suivant le mot de David, ils racontent sa Gloire.

Prenons connaissance de la suite.

 

Développement :    

 

Première requête :

 

« Que ton nom soit sanctifié » Matthieu 6 : 9b

La formulation de la prière met l’accent sur l’importance du nom de Dieu. Après avoir appelé Dieu, « Notre Père », voici que nous demandons que ce nom soit sanctifié. Pourquoi insister sur le nom de Dieu ? Pourquoi n’est-il pas demandé de sanctifier le Père tout simplement ? Comment pouvons-nous sanctifié le nom de Dieu ?    Que faut-il comprendre ?

Commençons par reprendre la question du nom de Dieu. Pourquoi cette insistance ? Que nous disent les textes inspirés ?

Dès les origines, la Bible nous parle de l’importance du nom. Il ne sert pas seulement à différencier les individus, il définit leur identité. (Cf. Luc 10 :20b) Il y a même changement d’identité, quand le rapport avec Dieu devient plus personnel, intimiste, solennel. C’est le cas d’ Abram qui devient Abraham et de son épouse Saraï qui devient Sara (Cf. Genèse 17 :5, 15). C’est encore le cas de Jacob. Son nom devient Israël (Cf. Genèse 32 : 28). Dans les évangiles, c’est aussi le cas de Simon. Il sera désormais appelé Pierre (Cf. Matthieu 16 : 17-18). Comme nous le constatons, non seulement le nom permet d’identifier précisément une personne, mais plus encore, il est porteur d’une histoire. Dans les cas cités, c’est la rencontre avec Dieu qui a été l’élément déclenchant.

 

Connaître le nom de Dieu révèle l’intention profonde d’établir avec lui une relation solide. Quand Moïse découvre qui est Dieu, et la mission que l’Eternel veut lui confier, il pose la question :

 « S’il me demandent quel est ton nom, que leur répondrai-je ? Dieu dit à Moïse : Je suis celui qui suis. Et il ajouta : c’est ainsi que tu répondras aux enfants d’Israël : Celui qui s’appelle « Je suis » m’a envoyé vers vous. » Exode 3 :13-14. Dieu s’est défini à la première personne du singulier dans un éternel présent.

Au cours de l’histoire d’Israël, Dieu a été appréhendé, suivant les circonstances, de différentes façons. Plus de 18 noms différents lui sont attribués. L’invocation du nom de Dieu deviendra désormais partie intégrante de l’adoration et du culte ; (Cf.1 Chroniques 16 : 8-12, Psaumes 20 :8, Esaïe 12 :4).

 

Dans une relation plus personnelle, David démontre son amour pour Dieu. Il manifeste son bonheur d’invoquer son nom. Le psaume 116 est remarquable à ce sujet.

Dans leur quête de découverte de qui est Dieu, les fidèles ont, au cours des âges, pris conscience de sa Sainteté. Esaïe traduit bien le ravissement qui fut le sien, lors d’une vision, l’année de la mort du roi Ozias. Il vit des séraphins qui se tenaient en la présence de Dieu. Ils criaient l’un à l’autre :

 « Saint, saint, saint, est l’Eternel des armées ! Toute la terre est pleine de sa gloire ! » Esaïe 6 : 3. Faisant écho à cette proclamation les quatre êtres vivants de l’Apocalypse redisent perpétuellement : « Saint, saint, saint, est le Seigneur Dieu, le Tout-Puissant, qui était, qui est, et qui vient ! » Apocalypse 4 : 8

 

Même si Dieu n’a cessé de rechercher la proximité avec l’humain, il serait dommageable de considérer Dieu comme le copain. La révérence et le respect font partie des fondations de la prière. Le réflexe de prêter à Dieu des sentiments humains peut paraître naturel. Il convient toutefois d’être réaliste sur le fait, que la grandeur de Dieu nous dépasse. Elargissons le plus possible notre compréhension du « je suis » de l’Eternel.

Le nom de Dieu devrait se prononcer dans un contexte d’atmosphère d’amour, avec beaucoup d’humilité.

 

Cela nous permet de faire la transition avec la suite du texte : «  Que ton nom soit sanctifié » v. 9

Comment pouvons-nous sanctifié le nom de Dieu ? Que faut-il entendre par sanctifier ? La racine du verbe grec est en rapport avec la sainteté. Elle évoque aujourd’hui dans notre langage commun, l’idée de perfection. Dès lors, comment des êtres pécheurs peuvent-ils avoir une quelconque influence sur la perfection de Dieu ?

A moins que le verbe, au temps de Jésus, signifiait autre chose ! Que disent l’ancien et le nouveau testament ?

L’expression de la volonté suprême de Dieu pour l’homme s’est traduite par le don de la loi au Sinaï. Les 10 commandements ont été donnés pour que notre marche ascendante vers son royaume, soit balisée heureusement. Le quatrième commandement exprime une notion particulière du verbe sanctifier.

 

« Souviens-toi du jour du repos pour le sanctifier. Tu travailleras          6 jours, et tu feras tout ton ouvrage. Mais le 7ème jour est le jour du repos de l’Eternel, ton Dieu : tu ne feras aucun ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton bétail, ni l’étranger qui est dans tes portes. Car en six jours l’Eternel a fait les cieux, la terre et la mer, et tout ce qui est contenu, et il s’est reposé le 7ème jour : c’est pourquoi l’Eternel a béni le jour du repos et l’a sanctifié » exode 20 :10  

 

Il est clair, dans ce texte, que le verbe sanctifier a le double sens de : mettre à part et de consacrer. En souvenir de la création de Dieu, dont nous sommes le couronnement, il nous est demandé de mettre à part le 7ème jour de la semaine et de le considérer comme sacré. La raison donnée : ce jour appartient à Dieu. En l’observant, nous entrons en communion avec lui, et nous célébrons l’anniversaire de sa création. (A propos de Genèse 2 :2, la T.OB dans son commentaire dit «  le repos de Dieu au 7ème jour fonde le repos hebdomadaire de l’homme). Mais le 7ème jour ou sabbat, révèle aussi qui est Dieu. En le célébrant, plus qu’en l’observant, nous entrons dans la relation désirée par Dieu.

« Je suis l’Eternel, votre Dieu. Suivez mes préceptes, observez mes ordonnances, mettez-les en pratique. Sanctifiez mes sabbats, et qu’ils soient entre moi et vous un signe auquel on connaisse que je suis l’Eternel, votre Dieu. » Ezéchiel 20 : 19-20

La traduction œcuménique de la Bible (T.O.B) traduit :

 «  Tenez mes sabbats pour sacrés… »

 (Ilest regrettable sur ce point qu’une modification humaine soit à l’origine du changement du jour de repos. Restons fidèles à ce que Dieu a demandé, plutôt que de suivre des volontés humaines -Cf. Actes 4 : 19- Cette question de fidélité est entre Dieu et moi, comme le rapporte Ezéchiel.)  

Le Seigneur a donné le même sens à ce verbe sanctifier.

 « Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde. Sanctifie-les par ta vérité. Ta parole est la vérité. Comme tu m’as envoyé dans le monde, je les ai aussi envoyés dans le monde. Et je me sanctifie moi-même pour eux, afin qu’eux aussi soient sanctifiés par la vérité. » Jean17 :16-19 Là encore, nous retrouvons le double sens de mettre à part et de consacrer.

 

«  Que ton nom soit sanctifié » cette demande s’adresse d’abord à Dieu. Elle nous implique ensuite.

 

1) D’abord à Dieu :

 

Elle est l’expression de notre reconnaissance de son identité unique et incomparable. La confession de foi juive exprime bien cette réalité quand le Schema est prononcé : « Ecoute, Israël ! L’Eternel, notre Dieu, est le seul Eternel. Tu aimeras l’Eternel, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force ». Deutéronome 6 :4-5

Certains commentateurs ont aussi relevé que c’est bien à Dieu que cette demande est faite. La sanctification de son nom serait demandée comme un désir d’accomplissement de ses promesses. La traduction de la T.O.B. va dans ce sens quand elle propose au lieu de « que ton nom soit sanctifié » :

 « Fais-toi reconnaître comme Dieu » v. 9

Un texte d’ Esaïe confirme le double sens de notre demande à Dieu, le Père :

« Vous êtes mes témoins, dit l’Eternel, vous et mon serviteur que j’ai choisi, afin que vous sachiez, que vous croyez, et compreniez que c’est moi : Avant moi il n’a point été formé de Dieu, et après moi il n’y en aura point. C’est moi, moi qui suis l’Eternel, et hors de moi, il n’y a point de sauveur. » Esaïe 43 : 10-11

 

Ce texte nous rappelle que lorsque nous présentons notre prière à Dieu en disant « que ton nom soit sanctifié », nous reconnaissons son unicité et sa transcendance. Mais encore, nous nous positionnons aussi comme témoins pour Dieu.

 

2) Cette demande nous engage :

 

Parce que le nom de Dieu doit aussi être sanctifié dans nos vies. C’est Lui que nous mettons à part, en Lui donnant la première place. (Cf. Matthieu 6 :33) Comme le dit le texte d’ Esaïe cité ci-dessus, notre prière nous engage à savoir, croire et comprendre. Il y a tout à la fois, le désir de connaissance, le besoin de mieux comprendre la volonté divine, et la joie d’y adhérer.

Rapportant les paroles de Dieu, Moïse déclare : « Je serai sanctifié par ceux qui s’approchent de moi… » Lévitique 10 : 3

 

Il devrait en être de même dans notre relation avec l’envoyé du Père, notre seul et unique intercesseur auprès de Lui, Jésus-Christ. L’ Apôtre Pierre l’ affirme : « Mais sanctifiez dans vos cœurs Christ le Seigneur, étant toujours prêts à vous défendre avec douceur et respect, devant quiconque vous demande raison de l’espérance qui est en vous » 1 Pierre 3 :15

 

Cette prière « Que ton nom soit sanctifié » a donc bien un double sens. Elle révèle la réalité d’un dialogue. Elle nous engage à nous positionner devant le Créateur. De son coté, Dieu s’engage envers nous par une réponse aussi variée que le nombre des étoiles de notre galaxie.

« Je suis l’Eternel qui vous sanctifie… Vous ne profanerez point mon saint nom, afin que je sois sanctifié au milieu des enfants d’Israël. Je suis l’Eternel qui vous sanctifie » Lévitique 20 : 8,32

De même, nous sommes sanctifiés par Jésus-Christ :

« Mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus-Christ, et par l’Esprit de notre Dieu » 1 Corinthiens 6 : 11

Cette prière nous unit vraiment à Dieu et à Christ :

« Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés sont tous issus d’un seul » Hébreux 2 : 11a (Voire aussi hébreux 10 :10,29)

En prenant conscience de la profondeur des mots utilisés par notre Seigneur, notre foi est ravivée, notre engagement devient plus cohérent, notre joie est amplifiée.

Gloire soit rendue à Dieu, notre Père. Il a tout disposé pour que nous soyons dans une marche confiante et sereine, quelques soient les difficultés de cette marche. Nous sommes en route vers le royaume, aspirés par l’attraction puissante de l’amour du Père.

Cette prière nous renvoie encore à une réciprocité redoutable… En effet, si nous participons à la sanctification du nom de Dieu par notre témoignage, il convient d’être au clair sur le processus de notre propre sanctification.

« Recherchez la paix avec tous, et la sanctification, sans laquelle personne ne verra le Seigneur ». Hébreux 12 :14

Déjà dans l’ancien testament, il était dit : « Je suis l’Eternel, votre Dieu ; vous vous sanctifierez, et vous serez saints, car je suis saint… » Lévitique 11 : 44

L’apôtre Paul est aussi très clair sur le sujet : « Ce que Dieu veut, c’est votre sanctification ; c’est que vous vous absteniez de la débauche ; c’est que chacun de vous sache posséder son corps dans la sainteté et l’honnêteté, sans vous livrer à une convoitise passionnée, comme font les païens qui ne connaissent pas Dieu ; c’est que personne n’use envers son frère de fraude et de cupidité dans les affaires… Car Dieu ne nous a pas appelés à l’impureté, mais à la sanctification. » 1 Thessaloniciens 4 : 3-7

 

La sanctification est une transformation qui s’opère dans nos vies, grâce à l’aide du Saint-Esprit. C’est l’œuvre de Dieu en nous, c’est sa réponse à notre prière « que ton nom soit sanctifié ». L’apôtre Paul explique bien que ce travail intérieur, il est réalisé par Dieu (Nous en sommes incapables, Cf. 2 Corinthiens 3 :5-6). Souvenons-nous que c’est Dieu qui produit en nous le vouloir et le faire selon son bienveillant dessein (Cf. Philippiens 2 :13). C’est encore par sa volonté, que Jésus-Christ «  a été fait pour nous, sagesse, justice, sanctification et rédemption » 1 Corinthiens 1 :30

 

En résumé, nous sommes sanctifiés par :

 

 - l’Esprit de Dieu, (Cf. 2 Thessaloniciens 2 : 13 ; 1 Pierre 1 :2)

Jésus-Christ (Cf. 1 Corinthiens 1 : 2 ; Hébreux 10 :10), mais encore

 la Parole de vérité « Sanctifie-les par ta vérité : ta parole est la vérité » Jean 17 :17. Assurément, voilà bien l’œuvre que Dieu accomplit dans nos vies par sa grâce.

 

En disant « Que ton nom soit sanctifié », c’est aussi vers cette acception d’être nous-mêmes sanctifiés que nous acceptons d’aller. C’est vers cette cohérence difficile qu’il nous faut tendre.

 

Conclusion :

 

Cette première requête nous fait entrer dans le champ de connaissance de Dieu. Prononcer son nom (Au demeurant intraduisible. YHWH désignent le nom le plus sacré de la langue sacrée. Les juifs pensent qu’il ne faut pas le prononcer, ils lui substituent celui d’ Adonaï) mène à la découverte de qui est Dieu. L’important n’est pas tellement le nom, mais ce que nous y mettons derrière. Cela traduit ce que nous avons perçu de Lui. Ainsi, prononcer son nom, c’est être en relation directe avec ce que ce que nous avons connu, compris, reçu et accueilli de l’Eternel. En bref, tout ce que nous percevons et qui émane de sa personne... Quant au fait de sanctifier son nom, cela découle de ce que nous venons de dire. Il y a une double action : celle qui part de ma demande vers Dieu et celle qui m’engage comme témoins. Pour Dieu, il y a l’accueil, et sa réponse. Elle contribue à l’œuvre nécessaire de ma sanctification. Mon rôle consiste à accueillir ce qui vient de Dieu. Cette première requête révèle nos vraies motivations et celle du Père. Elle recouvre les deux sens de mise à part et de consécration. Concrètement, cette conclusion première devrait nous conduire à faire de notre Dieu-Père, la priorité de notre vie…

Quel programme !!!

 

                                                                                                                                                                                                     Jacques Eychenne

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