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LES LECONS DU DESERT ou la foi responsable Nombres 20 : 1-6, 14-21 Nombres 21 : 4-9 |
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Introduction :
L’histoire que nous allons attentivement scruter nous rappelle qu’il suffit parfois d’un seul incident pour que tous les projets, même les plus réfléchis, puissent être contredits et contrariés par les circonstances. Sur un plan plus personnel, combien de fois avons-nous caressé des objectifs heureux qui se sont transformés en déception, pour ne pas dire en catastrophe ?
De ce fait, l’épisode de l’histoire d’Israël (que nous allons visiter), nous renvoie à tous ces contretemps déroutants que nous avons tous expérimentés. Comment dès lors surmonter nos déceptions ?
Examinons maintenant la situation historique du peuple d’Israël à un moment crucial de son périple. Des promesses avaient été faites par Dieu (cf. Exode 3 : 8 ; 13 : 5 ; 33 : 3)... Après la sortie éclatante du pays d’Egypte, la nécessité d’habiter un pays s’imposait. Pour son bien-être, pour la cohésion de ce peuple, pour avoir le bonheur de jouir d’un espace de liberté, le pays de Canaan lui avait été promis. Après une longue marche parsemée d’obstacles, les israélites sous la conduite de Moïse et Aaron sont sur le point de savourer le bonheur d’être enfin arrivés à destination…
Quand ils arrivent à Kadès, non seulement le plus dur du parcours a été réalisé, mais ils ne sont guère plus très loin du pays de Canaan (pays de la promesse). Nous dirions aujourd’hui : C’était la dernière ligne droite, la dernière étape, le final... Seulement voilà ! Entre le pays de la promesse et le peuple, il y avait le pays d’Edom… Or, les habitants de ce territoire étaient fortement armés, et ils avaient la réputation de bien défendre leur terre.
Moïse désirait aller au plus vite et au plus court. On le comprend ! On estime que le peuple avait déjà parcouru plus de 1500 km (dans les circonstances difficiles que nous connaissons) pendant près de 40 ans, dans ces régions aréiques (donc non cultivables). Son désir de choisir la route la plus courte était donc amplement justifié !
Mais, c’était sans compter sur la volonté du roi d’Edom. Lui, percevait cette traversée comme un péril, surtout après avoir eu connaissance de la façon extraordinaire dont ce peuple était sorti d’Egypte. Si ce peuple sans armée et sans défense était venu à bout de la toute puissante Egypte, le roi d’Edom avait des raisons d’être inquiet ! Aussi refusa-t-il catégoriquement et fermement le passage de son territoire à Israël…
Les conséquences pour Israël furent terribles… Non seulement il fallut faire un grand détour, mais plus encore sur le plan spirituel, ce fut un désastre…
Développement :
Cette situation nous fait instinctivement poser question :
pourquoi Dieu n’a-t-il pas permis, à son peuple, de traverser ce pays sans encombre ?
Pourquoi, après une sortie d’Egypte prodigieuse, Dieu n’est–il pas intervenu pour accompagner la marche de son peuple et n’a-t-il pas préparé une arrivée triomphale ?
(Question subsidiaire : pourquoi Dieu permet-il que nous fassions de longs détours dans nos vies, déjà jonchées d’obstacles pénibles, pour arriver à comprendre des choses très simples ?)
Mais revenons à l’histoire du peuple d’Israël. Que disent les Saintes Ecritures en réponse à ces questions. Les éléments de réponse ne manquent pas. Citons entre autres, le témoignage contenu dans la lettre aux Hébreux (cf. Hébreux 3 : 12-19).
La réponse paraît limpide : le peuple a été incrédule. En termes relationnels, la confiance en Dieu avait disparu. Le peuple d’Israël refuse d’entrer dans le bon projet divin. C’est surprenant ! Yahvé-Adonaï n’avait-il pas montré de la compassion pour libérer son peuple de l’esclavage égyptien ? Comment expliquer le rejet de son libérateur? Le sacro-saint principe de liberté étant respecté par le créateur, le peuple était maintenant placé devant ses responsabilités… Arrêtons-nous un instant ! Que nous apprend cette situation historique à Kadès ?
Quand la foi n’est plus au cœur de notre relation à Dieu, que se passe-t-il ?
Tout simplement les murmures et les critiques apparaissent… La vision devient plus négative, la perception des évènements s’en trouve faussée… On entre dans le déni spirituel. Il s’ensuit souvent, en conséquence, l’errance dans nos déserts… Dieu avait promis un pays où coulent le lait et le miel, et voici que le peuple arrive à Kadès. Dans ce désert de Tsin, point d’eau pour le bétail, point d’endroit où semer, aucun fruit à manger (cf. Nombres 20 : 1-5)… Alors, le peuple s’en prend à son chef : Moïse.
Certes, les circonstances ne prêtaient pas à l’optimisme, mais pourquoi ce peuple a-t-il perdu confiance en Dieu et en ses responsables ? Dieu n’avait-il pas toujours répondu à ses besoins ?
Quand la foi est totalement absente, que se passe-t-il ? Pointons les réactions du peuple :
- Il a refusé d’entrer dans le projet de son libérateur ! (cf. Nombres 20 : 3-5)
- Il a cherché querelle à Moïse. (Ne cherche-t-on pas des boucs émissaires pour justifier nos refus d’entrer dans une relation de foi).
- Il a reporté sur ses responsables les conséquences de ses propres choix.
- Il n’a vu que les aspects négatifs des évènements.
- Il a posé de nombreuses questions en redoutant les réponses de ses chefs.
- Il a entretenu un climat délétère avec pour « musique de fond » la complainte des inlassables murmures et l’accusation de ses responsables spirituels…
- Il ne s’est pas aperçu que la difficulté venait de lui...
- Il n’a pas accepté l’héritage qui lui était proposé (cf. 1 Chroniques 16 : 18 ; Psaume 105 : 11).
Ce peuple d’Israël n’est-il pas un reflet de ce que nous sommes ?
Que de murmures dans nos vies ! Nous sommes rarement totalement satisfaits. Nous voulons parfois tout et son contraire.
N’avons-nous pas inconsciemment une relation à Dieu puérile, intéressée et exigeante ?
Tout comme pour ce peuple d’Israël, la Canaan de notre bien-être spirituel et global, n’est pas loin de nous. Dieu a un bon projet pour les humains (cf. Jérémie 29 : 11), mais combien lui font vraiment confiance ? Nous comptons sur Dieu, uniquement quand nous avons épuisé, humainement, toutes nos solutions. D’après vous, cela induit quel type de relation à Dieu ?
D’après les prophéties bibliques, ne sommes-nous pas dans les mêmes circonstances ?
Le projet de Dieu parle aussi symboliquement d’une Canaan céleste (cf. Hébreux 11 : 9-10). Elle illustre une patrie céleste appelée encore le royaume de Dieu. Jésus a dit à ses disciples : « prêchez et dites : le royaume des cieux est proche » Matthieu 10 : 7. Ce royaume n’est plus très loin. Nous sommes prophétiquement dans la dernière ligne droite.
En fait, ce n’est pas le Seigneur qui tarde dans l’accomplissement de sa promesse comme quelques–uns le croient. Il use simplement de patience (cf. 2 Pierre 3 : 9) C’est nous qui souvent ne sommes pas prêts à aller à sa rencontre, en traversant par la foi « l’Edom » de notre temps. (cf. Les paraboles des dix vierges et des talents, sont éclairantes sur ce point. Matthieu 25 : 1-30).
Le peuple a sombré parce que sa relation à Dieu et à ses responsables, n’était plus une réalité vivante et positive.
Pourtant, Dieu n’avait pas cessé d’encourager le peuple à lui faire confiance (à Kadès–Barnéa, Yahvé-Adonaï, n’avait-il pas déjà pardonné l’incrédulité du peuple ? cf. Nombres 14 : 1-20 ; par la suite, ne donnera-t-il pas la victoire au peuple sur le roi cananéen Arad ? cf. Nombres 21 : 1).
Alors la patience de Dieu change d’aspect, elle devient pédagogique. Il faut des remèdes chocs à des situations difficiles.
L’Eternel va donc présenter au peuple la thérapie douloureuse du serpent d’airain. (cf. Nombres 21 : 6-9). L’israélite mordu par un serpent devait regarder un autre serpent en airain, élevé sur une perche. Il devait obligatoirement faire acte de foi.
Le remède de Dieu était simple à exécuter : un simple regard suffisait.
Personne ne pouvait se sauver par lui-même. Il était impossible de se préserver de ce venin fatal dans ce désert infecté de ces dangereux reptiles. Tous étaient concernés, car tous avaient été mordus par des serpents au venin mortel. Dieu ne demandait qu’une seule chose : Regarder ce serpent pour avoir la vie sauve. Cela nous rappelle l’emblème du corps médical avec le caducée. (Si certains font remonter la signification originale de ce symbole au temps des Grecs et des Romains, en l’attribuant à deux divinités : Hermès et Asclépios, les croyants israélites et aujourd’hui les chrétiens, peuvent attribuer son origine au temps des Pharaons de Moïse. La référence au serpent d’airain du désert est d’autant plus intéressante que nous savons d’après la mythologie grecque que le caducée servait à guérir les morsures de serpents. cf. Voir tous les articles sur le sujet sur internet.) Oui, c’est incroyable, un seul regard suffisait ! Si un journaliste avait couvert l’évènement, il aurait titré : un regard pour la vie, ou le regard de la vie...
C’est au travers d’un objet hautement symbolique, choisi par Dieu avec pertinence, que l’on mesure sa grande miséricorde, et sa fabuleuse pédagogie.
Aujourd’hui, aux portes de la Canaan céleste, le peuple de Dieu en marche, est confronté à la même réalité, à la même pédagogie d’amour. C’est la même histoire qui se déroule, avec la même finalité : l’entrée du peuple de Dieu dans le pays promis qui est son royaume (la Canaan céleste, voir. Hébreux 11 : 13-16).
Devant notre difficulté à agir par la foi, Dieu sollicite notre mémoire. Il nous renvoie à cette expérience du passé :
Nous aussi assurément, avons tous été mordus par ce serpent antique, clairement identifié dans l’Apocalypse (cf. Apocalypse 9 : 12). Le mal a contaminé toute la création. Mais quelle est la situation des humains dans ce monde contemporain ? Face à cette confrontation avec la présence de cet intrus destructeur et initiateur de mort, qu’observons-nous ?
- Il y a ceux qui nient cette morsure : les incrédules. Ils parlent de balivernes et ne croient pas à la réalité de celui qui est appelé : « le dragon, le serpent ancien, qui est le diable et Satan… Celui qui séduit toute la terre » » Apocalypse 20 : 2 ; 12 : 9. Ils disent que le péché est une invention des religieux pour maintenir chacun dans l’obscurantisme. C’est bien connu, la religion n’est-elle pas l’opium du peuple ?
- Il y a ceux qui reconnaissent avoir été mordus : les réalistes épicuriens.
Voulant jouir au maximum de tous les plaisirs de la vie, ils minimisent la gravité de cette morsure. Ils disent : « mais ne vous en faites pas ! Ce n’est rien ! Ce n’est pas grave ! Ce n’est qu’une toute petite morsure ! Elle va guérir toute seule, laisser faire le temps, vous verrez … Dieu est tellement bon ! Il va vous guérir sans condition. On ira tous au paradis, ne vous en faites pas, profitez au maximum de la vie… »
- Il y a ceux qui sont très conscients de la gravité de la morsure : les réalistes pragmatiques. Ils reconnaissent la gravité de la blessure, mais ils cherchent dans ce monde, un bon médecin avec un bon remède. Ils s’affairent de partout pour trouver par eux-mêmes une solution spirituelle à leur difficulté spirituelle. Ils vont parfois aux confins de la terre rencontrer des gourous, consulter des voyants, chercher la potion magique. Conscients d’être dans un schéma de mort certaine, ils font tout pour trouver et mériter la guérison. Sur ce terrain, on trouve toujours des spécialistes du prêt à vous délester de votre mal… Mais, il faut payer cher, et parfois très cher. Pourtant ce ne sont que des remèdes placébos.
- Et puis, heureusement, Il y a ceux qui conscients de la gravité de la morsure cherchent en Dieu la solution : les acteurs d’une foi responsable.
Devant la gravité des faits, ils prennent le temps de la réflexion. Ils se remettent en question, et cherchent en dehors d’eux et en eux la solution. Sachant que Dieu est avant tout un père aimant, ils décident de lui faire confiance une fois pour toutes. Ces derniers acceptent les paroles toutes simples de Jésus :
« Et comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut de même que le fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle. » Jean 3 : 14,15.
Notons que l’invitation divine s’adresse à chacun (πᾶς = traduit par quiconque, souligne davantage la totalité). Mais, en fait seul, celui ou celle, qui est conscient de sa véritable situation, a la volonté humble et reconnaissante de regarder à Christ. Mais comment une invitation si simple, et si fondamentale peut-elle être refusée ? Quelque part, en revisitant l’histoire de ce peuple, on reste perplexe devant son incrédulité. Pourtant, ne voyait-il pas chaque jour, la manifestation de la bonté de Dieu ? En effet, que disent les textes anciens : « Je t’ai conduit pendant 40 ans dans le désert dit l’Eternel ; tes vêtements ne se sont point usés sur toi, et ton soulier ne s’est point usé à ton pied… » Deutéronome 29: 5.
Dieu, comme un super intendant a donné à boire, à manger, de quoi se vêtir à son peuple. Tout lui a été donné, tout lui a été promis… Yahvé-Adonaï a répondu à ses inquiétudes concernant les besoins primaires de sa vie quotidienne. Et de plus, il l’a conduit, chaque jour, à l’école pratique de la vie, comme un père conduit chaque matin son enfant à l’école de la république. De jour, il y avait une nuée qui traçait sa route, de nuit une colonne de feu signalait sa présence parmi le peuple. C’était un peu comme un feu de camp au milieu des tentes… Dieu assurait ainsi à chacun, les bienfaits de sa garde, de sa protection, de sa direction. (cf. Exode 40 : 38).
Et pourtant, malgré tout ce débordement d’attentions et d’affection, les israélites ne sont pas entrés dans la relation de confiance. Ils n’ont pas eu foi en lui. Quelle tristesse pour Dieu ! Quelle douleur pour ce Père aimant ! Bien des siècles plus tard, Jésus, l’envoyé du Père, connaîtra la même douleur. L’expérience récurrente est similaire. Devant Jérusalem, la capitale chérie .., il a pleuré. (cf. Luc 19 : 41-44)
L’évangéliste Matthieu rapporte ainsi la déclaration émouvante du Seigneur :
« Jérusalem, Jérusalem, qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ! » Matthieu 23 : 37.
Mais revenons à l’expérience du peuple d’Israël. Un seul regard suffisait pour avoir la vie sauve, cela paraît incroyable ! Etait-ce beaucoup demandé ? (cf. Nombres 21 : 9) L’apôtre Jean, le disciple qui aimait Jésus, recevant l’instruction spirituelle en rapport avec l’expérience de ce peuple d’Israël, rappelle :
« Et comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut de même que le Fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle. Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle » Jean 3 : 14-16.
Le serpent d’airain, symbolisait donc la victoire du Christ sur le serpent ancien, appelé le diable et Satan. (cf. Apocalypse 20 : 2)
Conclusion :
A travers cette histoire, nous découvrons symboliquement le grand projet de Dieu : L’envoi de son propre fils pour vaincre le serpent. Sa victoire sur le mal ouvre une nouvelle page de l’histoire de notre humanité. On se remémore aussi le drame de l’éden. C’est par un serpent que la relation à Dieu a été brisée. Dieu a renvoyé Adam et Eve du paradis, là le peuple a été contraint de faire un grand détour. Comme tout est parti d’un serpent, c’est par un autre serpent que la vie va s’exprimer. Et pour bien nous faire comprendre que c’est l’amour qui va triompher, Christ a été élevé (c’est lui le serpent d’airain). Sa victoire devient notre victoire par la foi. Christ est venu rassembler, protéger, guérir, et sauver. L’éradication du mal a pour finalité l’établissement d’un autre monde.
De même que l’israélite n’avait rien à faire, sinon qu’à porter un regard sur le serpent d’airain, de même aujourd’hui, il nous suffit de regarder à la croix pour être guéris.
Un seul regard de foi nous projette dans l’espérance de son royaume d’amour.
N’est-ce pas magnifique ! Un seul vrai regard d’espérance en Christ ! Quand on pense à tout ce chemin parcouru par ce peuple dans le désert... Il devait comprendre l’essentiel. Or, cet essentiel était en rapport avec la vie et la relation d’amour qui s’accueillent par une foi responsable. (Pour ceux et celles qui ne l’ont pas compris, que cela fût dur... Faire toute cette route, arriver aux portes du pays promis, et ne pas y entrer… Quelle amère déception ! Marie, la sœur d’Aaron est morte à Kadès. Son frère mourut lui aussi sur la montagne d’ Hor (cf. Nombres 20 : 1,28) à la frontière du pays d’Edom. Comme tant d’autres par la suite, ils n’ont pas vu la terre promise à cause de leur incrédulité).
« Il y a l’avenir qui se fait et l’avenir qu’on fait. L’avenir réel se compose des deux », propos sur le bonheur, Alain, philosophe français (1868-1951).
Eychenne Jacques
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