Voici l' Agneau !

 

 

 

Voici l’Agneau

       de Dieu

   Jean 1 : 36

 

Introduction :


Dans le contexte récent du salon international de l’agriculture, méga foire agricole de Paris (plus grande ferme au monde), et de l’approche de la célébration pascale dans les milieux chrétiens, il est bon de revisiter le prologue de l’évangile de Jean. Ce texte nous apprend qu’une Parole, qui était avec Dieu au commencement de toutes choses, s’est faite chair. Notre planète a été l’objet d’une attention particulière :

« la parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité; et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme la gloire du Fils unique venu du Père. Jean lui a rendu témoignage, et s'est écrié: C’est celui dont j'ai dit: Celui qui vient après moi m’a précédé, car il était avant moi. Et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce pour grâce; car la loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus -Christ. » Jean 1:14-17

Jean, dit le baptiste (de la parenté de Jésus, probablement un cousin cf. Luc 1 :36), a été émerveillé par cette rencontre. Elle venait corroborer ce que Dieu avait déposé en son cœur par révélation. Aux multiples questions que les auditeurs du désert venaient lui posait, Jean répondait avec beaucoup d’humilité. Il disait : « Moi, je baptise d’eau, mais au milieu de vous il y a quelqu'un que vous ne connaissez pas, qui vient après moi; je ne suis pas digne de délier la courroie de ses souliers. » Jean 1: 26-27  

Jean-Baptiste est conscient qu’un évènement important est sur le point d’arriver. Toute l’atmosphère de cette époque est marquée par une attente messianique. On supporte de plus en plus mal l’occupation romaine, on aspire à une délivrance…

 

Développement :


Dans cette ambiance si particulière, Jean-Baptiste annonce une révolution en milieu juif.

Il dit : « la loi a été donnée à Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ. » Jean 1 : 17. Mais,faut-il entendre ce texte comme une opposition entre deux régimes ? Celui de la loi et celui de la grâce ? Et que la grâce supprime la loi ?

Cette compréhension ne s’harmonise pas avec l’ensemble de la révélation. Sinon il faudrait parler d’une néfaste aporie (contradiction insurmontable dans un raisonnement). Il est difficile de soutenir une opposition entre la loi et la grâce, entre la loi et la vérité. Les deux ont un rôle différent et complémentaire. On parle souvent de loi de Moïse, mais en fait, n’est-ce pas Dieu qui a donné toutes les instructions à Moïse ? Assurément (cf. Exode 3 :15 ; 4 :12 ; 15 :25-26) Dieu s’est lui-même impliqué en écrivant les deux tables de la loi (le décalogue ou 10 commandements) (cf. Exode 24 :12 ; 31 :18). Dieu pouvait-il se contredire en envoyant son Fils proclamer le contraire ?

Non ! Le Christ est venu faire la volonté de son Père (cf. Jean 5 :19 ; 12 : 49-50) et il a précisé lui-même :

« n'allez pas croire que je sois venu abroger la Loi ou les Prophètes: je ne suis pas venu abroger, mais accomplir. Car, en vérité je vous le déclare, avant que ne passent le ciel et la terre, pas un i, pas un point sur l'i ne passera de la loi, que tout ne soit arrivé. Dès lors celui qui transgressera un seul de ces plus petits commandements et enseignera aux hommes à faire de même sera déclaré le plus petit dans le Royaume des cieux; au contraire, celui qui les mettra en pratique et les enseignera, celui-là sera déclaré grand dans le Royaume des cieux. »  Matthieu 5:17-19 (version TOB).

 

Le fils de Dieu est en parfaite harmonie avec son Père. Il est venu révéler la volonté du Père pour le salut de notre humanité… De plus, il ne faut pas oublier que la grâce était aussi présente dans l’Ancien Testament. Elle prend sa source au jardin d’Eden. Elle traverse les temps jusqu’à la fin. Elle entoure et encadre la loi. (cf. Genèse 2 : 17 // 3 : 8,15 ; 5 : 2 ; Exode 20 : 24-26 ; Lévitique 5 : 17-18 ; 17 : 11 etc.) D’ailleurs, Jean-Baptiste laisse entendre que la grâce, liée à Jésus-Christ est antérieure à sa naissance, alors que nous savons qu’il est né 6 mois avant le Christ (cf. Luc 1 : 26). De plus, le prologue de l’évangile de Jean parle de la divinité du Christ, donc de l’existence éternelle de la grâce (cf. Jean 1 : 1-59-13).

 

Il n’y a donc pas opposition entre la loi et la grâce. (Point n’est besoin de remarques adventices ou supplémentaires) Mais, si cette opposition n’existe pas, comment comprendre la phrase qui a suscité ce petit développement ?


De la même façon qu’il n’y a pas opposition entre l’Ancien et le Nouveau Testament (on ne peut comprendre le nouveau qu’à la lumière de l’ancien), il y a complémentarité entre la loi, dite de Moïse et la grâce et la vérité en Jésus-Christ. Comme le dit si bien André Chouraqui l’apôtre Jean pense en hébreu et écrit en grec (1).

Le régime de la loi n’était pas suffisant. Il était nécessaire pour souligner les transgressions (cf. Romains 5 : 20-21). La loi, comme en médecine, ne pouvait que poser un diagnostic précis (elle était incapable de soigner). Il fallait l’intervention d’un bon médecin (le Christ). Son action s’est caractérisée par l’apport d’un vrai remède au mal. Il fallait que la grâce, manifestée en plénitude en Jésus-Christ, nous offre la vérité du salut (cf. Ephésiens 2 : 8) c'est-à-dire une solution radicale face au cancer du mal.

L’apôtre Paul a largement développé le sujet. Il ressort de son enseignement que nous sommes maintenant sous le régime de la grâce avec la loi. La loi ne peut nous sauver, elle révèle les fautes, la grâce les recouvre et nous octroie par la foi en Jésus-Christ, la vie éternelle (cf. Romains 7 : 7-13 ; 6 : 23). L’évolution de l’histoire, entre la loi de Moïse et la grâce et la vérité par Jésus-Christ, pointe un progrès considérable. Désormais, nous ne sommes plus sous le coup d’une condamnation. « Christ est la fin de la loi pour la justification de tous ceux qui croient » Romains 10 : 4 Nous sommes maintenant libres en Jésus-Christ (cf. Galates 5 : 1)

 

Le témoignage de Jean-Baptiste annonce cette liberté. L’instant est émouvant. Il se situe exactement au lendemain de sa première prédication. Il est encore avec deux de ses disciples. Il voit Jésus. Ce dernier marche paisiblement et semble poursuivre son chemin. Alors Jean-Baptiste prononce devant ses deux disciples cette phrase inouïe : « voici l’Agneau de Dieu » Jean 1 :36-37

Le résultat est spectaculaire, surprenant, presque incompréhensible. Sous l’effet d’une attirance irrépressible, les deux disciples de Jean-Baptiste se détachent de lui et suivent Jésus-Christ. Le Maître sentant qu’on le suit se retourne et pose cette question : « que cherchez vous ? » idem, v.38

Ce qui semble avoir été évident pour les disciples de Jean-Baptiste, peut ne pas l’être pour nous. Suivre un agneau risque de nous décevoir. Un autre animal plus charismatique, comme le lion, aurait davantage soutenu notre adhésion…

 

Pourquoi le Christ a-t-il été identifié à un agneau ? (C’est là que nous retrouvons la cohérence entre l’Ancien et le Nouveau Testament.) Si le Christ est présenté dans le prologue de Jean comme étant défini par la lumière, c’est bien parce que le Seigneur est venu mettre les projecteurs sur la quintessence de sa mission.

Quel éclairage nous apporte-t-il ?

« Voici l’Agneau », n’est point l’introduction ou le titre d’un conte de fées pour enfants. Ce n’est pas, non plus, la présentation d’une race régionale de brebis que l’on présente au Président de la République au salon international de l’agriculture à Paris. Si le symbolisme est difficile à déchiffrer aujourd’hui, il ne l’était pas au premier siècle de notre ère. Les Juifs du temps de Jésus étaient enracinés dans une culture hébraïque. Leur vie quotidienne était ponctuée par la pratique de la loi de Moïse. Les rabbins commentaient chaque sabbat le sens de l’observation de la loi, et l’adaptaient aux besoins des personnes. De plus, la solennité du message biblique était aussi marquée par des fêtes religieuses. Or, la plus importante entre toutes, la fête de Pâque mettait un agneau au centre de la cérémonie. Cette fête rappelait le fait historique fondateur de la sortie d’Egypte. Dieu délivra son peuple de l’esclavage égyptien. Cette émancipation constitua le renouveau de l’identité de ce peuple (la loi s’inscrit en référence à cet évènement, cf. Exode 20 :2). A l’occasion de cette fête très codifiée (cf. Deutéronome 16 :1-8 ; Lévitique 23 : 4-5), on offre un agneau pascal. La Pâque était la première fête de l’année, elle était commémorative de la sortie d’Egypte. Elle avait lieu au printemps, au mois de Nisan qui était le premier mois de l’année juive. Elle était fixée au 14ème jour de ce mois (cf. Mars-Avril)

 

Pour l’auditeur juif qui entend la prédication de Jean-Baptiste, le parallèle est instinctivement fait entre la loi de Moïse et l’agneau pascal. La mission du Sauveur va consister à établir un second parallèle entre l’agneau pascal et l’Agneau de Dieu. C’est certainement pour cette raison que Jean-Baptiste, sous l’inspiration divine, a précisé la veille de cette nouvelle rencontre, au cours de laquelle il place ses deux disciples en présence de l’Agneau de Dieu : « Voici l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde. » Jean 1 : 29 L’expression « qui ôte le péché du monde » est incompréhensible si elle n’est pas reliée au symbolisme du sacrifice de l’agneau pascal.

Interrogeons le citoyen lambda et posons-lui dans la rue la question : « est-ce qu’un agneau peut ôter votre péché ? ». Vous risquez d’être surpris du résultat.

Aujourd’hui, grâce aux commentaires inspirés des apôtres, nous saisissons mieux la signification et la portée de cette déclaration.

« Purifiez-vous du vieux levain pour être une pâte nouvelle, puisque vous êtes sans levain. Car le Christ, notre Pâque, a été immolé. Célébrons donc la fête, non pas avec du vieux levain, ni du levain de méchanceté et de perversité, mais avec des pains sans levain: dans la pureté et dans la vérité. » 1 Corinthiens 5 : 7-8(version TOB)

« …sachant que ce n'est point par des choses périssables, argent ou or, que vous avez été rachetés de la vaine manière de vivre héritée de vos pères, mais par le sang précieux, comme d'un agneau sans défaut et sans tache, celui du Christ, prédestiné avant la fondation du monde et manifesté à la fin des temps à cause de vous. Par lui vous croyez en Dieu qui l'a ressuscité des morts et lui a donné la gloire, de telle sorte que votre foi et votre espérance reposent sur Dieu. » 1 Pierre 1 : 18-21 (version TOB)


Le nouveau testament transforme la Pâque juive en Pâque chrétienne. Le Christ met un point d’orgue à son enseignement en instituant la sainte cène. Le second parallèle est établi entre l’agneau pascal et l’Agneau de Dieu. C’est dans ce contexte de la dernière pâque (que Jésus a prise avec ses disciples), que l’apôtre Jean nous dit clairement : « Avant la fête de la Pâque, Jésus sachant que son heure était venue, l'heure de passer de ce monde au Père, lui, qui avait aimé les siens qui sont dans le monde, les aima jusqu'à l'extrême. » Jean 13:1 (idem, TOB)

 

D’ordinaire, les chrétiens pensent que l’amour plénier du Christ s’est déployé à la croix. Les apôtres disent que c’est lors de la dernière Pâque prise avec eux. L’amour rédempteur du Seigneur a pénétré, tel un parfum de grand prix, le cœur des apôtres.

« Et quand ce fut l'heure, il se mit à table, et les apôtres avec lui. Et il leur dit: «J'ai tellement désiré manger cette Pâque avec vous avant de souffrir.

Car, je vous le déclare, jamais plus je ne la mangerai jusqu'à ce qu'elle soit accomplie dans le Royaume de Dieu.» Il reçut alors une coupe et, après avoir rendu grâce, il dit: «Prenez-la et partagez entre vous. Car, je vous le déclare: Je ne boirai plus désormais du fruit de la vigne jusqu'à ce que vienne le Règne de Dieu.» Puis il prit du pain et, après avoir rendu grâce, il le rompit et le leur donna en disant: «Ceci est mon corps donné pour vous. Faites cela en mémoire de moi.» Et pour la coupe, il fit de même après le repas, en disant: «Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang versé pour vous. »Luc 22 : 14-20 (idem, TOB)

Ainsi l’évangile de Jean, rapportant l’expérience de Jean-Baptiste, éclaire la compréhension de l’expression : « Voici l’Agneau ! »

 

Est-ce que les communautés chrétiennes ont bien assimilé ce symbolisme édifiant ?

 

L’apôtre Paul, le diffuseur du message chrétien en occident, déclare :


« En effet, voici ce que moi j'ai reçu du Seigneur, et ce que je vous ai transmis: le Seigneur Jésus, dans la nuit où il fut livré, prit du pain, et après avoir rendu grâce, il le rompit et dit: «Ceci est mon corps, qui est pour vous, faites cela en mémoire de moi.» Il fit de même pour la coupe, après le repas, en disant: « Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang; faites cela, toutes les fois que vous en boirez, en mémoire de moi.»

Car toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne. C'est pourquoi celui qui mangera le pain ou boira la coupe du Seigneur indignement se rendra coupable envers le corps et le sang du Seigneur. Que chacun s'éprouve soi-même avant de manger ce pain et de boire cette coupe. »

1 Corinthiens 11 : 23-28 (idem, TOB)


Revenons à la question du Seigneur : « que cherchez-vous ? ». Elle vient corroborer l’idée de la cohérence entre l’Ancien et Nouveau Testament. Ce début de l’évangile de Jean fait écho à la question de Dieu à Adam : «  où es-tu ? » Genèse 3 :9 . Autrement dit, la question de Jésus est censée répondre au même besoin de nos premiers parents. Adam et Eve étaient en errance par suite de leur rupture avec le contrat-confiance avec Dieu. Les deux disciples sont dans la même errance et dans l’attente d’un avenir meilleur. D’un côté nous avons la question d’un Père, de l’autre celle d’un Fils qui veut se laisser trouver par ceux qui le cherchent vraiment. Ce parallèle n’a rien de théologique, il relève simplement d’une relation d’amour. En Eden, la question était chargée d’un immense désir de Dieu de renouer avec ses créatures. Ici, du côté de Béthanie, la question du Seigneur à l’adresse des deux disciples est une invitation à le suivre. Comme on le constate, il n’y a pas de place pour une argumentation contraignante ou culpabilisante, il n’y a que des mots d’amour.

D’ailleurs le texte de Jean conclut par cette phrase merveilleuse de simplicité et de précision : « venez, et voyez » Jean 1 : 39 Autrement dit, constatez par vous-mêmes, faites-vous une opinion personnelle. Elle est là la révolution du Christ !

 

Conclusion :


En disant : « voici l’Agneau », Jean-Baptiste a ouvert le livre d’une autre histoire encore plus belle que la précédente. Et s’il a été considéré par Jésus comme le plus grand des prophètes (cf. Matthieu 11 : 11), c’est assurément parce qu’il a ouvert le premier chapitre d’une révolution sans égale. La révolution de la relation du cœur. Son influence et ses conséquences seront éternelles.

L’apôtre Jean (dont le nom signifie littéralement « la grâce de l’Eternel ») a eu raison de présenter, sous l’inspiration divine, ce sujet de la grâce. L’image appropriée qu’il a choisie est celle d’un agneau (sans défaut et sans tache). Jean nous immerge dans la grâce de Dieu. Elle nous libère, comme les Hébreux ont été libérés de la tutelle esclavagiste égyptienne.

Alors, comme aux deux disciples de Jean-Baptiste, Jésus-Christ nous dit : « Venez et voyez ». Laissons-nous attirer par la tendresse de son amour. Faisons-nous une conviction personnelle, prenons le temps de faire nos propres expériences. Ne craignons pas de mal faire, engageons-nous avec notre cœur. Cette révolution est la seule qui vaille la peine de se consacrer totalement. Cette révolution ne pourra jamais nous décevoir parce qu’elle est l’œuvre de Dieu, et non celle des hommes. Cette révolution n’est pas théorique, c’est la raison pour laquelle Jean-Baptiste associe la grâce et la vérité. Imitons les premiers disciples du Christ. Allons voir où le Christ demeure. Ils sont allés, et ils ont vu. Quand on rencontre la grâce, quand on est touché par la grâce, alors notre vie devient plus tonique. Elle peut surmonter les obstacles. Cette vision traverse le temps et la mort. Elle est plus forte que l’indifférence et la haine. Elle nous ouvre les pages d’une autre histoire, celle que nous devons écrire nous-mêmes, sous l’action de la grâce de Dieu manifestée en Jésus-Christ, notre Seigneur et Sauveur.

                                                                                    

                                                                           Jacques Eychenne

 

PS : (1) « Le génie de Jean consiste justement à employer le grec pour exprimer le mystère d’une vision hébraïque en créant, traducteur lui aussi, une langue nouvelle, sorte d’hébreu-grec où le ciel hébraïque se reflète dans son miroir hellénique » André Chouraqui, Iohanân, (Evangile selon Jean) éd. JC Lattès, 1993, p.49

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